Ft. Ha Ji Hoon : 13/03/10

Spoiler:

Aujourd’hui, petite pause, j’étais tranquille, Kanon gardait Takeru et j’avais pu danser un peu. Ce soir, je devais chanter dans un petit bistrot, ce n’était pas grand-chose mais je serais suffisamment payé pour payer ma part du loyer ainsi que quelques petits suppléments pour Takeru. J’étais content, j’allais faire partager ma passion une fois de plus et partager un bon moment du coup, mais à cet instant je ne me doutais pas un seul instant que j’allais croiser un être assez spécial…

J’entrais donc par l’arrière, comme on me l’avait demandé, remerciant le videur de m’avoir fait confiance lorsque je lui avais tendu ma carte japonaise qui avait pris une bonne dose de pluie. Elle était en papier, car j’avais oublié ma carte d’identité… je n’avais pu prouver ma parole qu’en montrant une carte du club de danse… quelle chance ! Je me préparais tranquillement, légèrement anxieux mais très excité d’être enfin sur scène, c’était tout moi ! En plus… personne n’aurait pu vraiment penser que j’étais anxieux, à moins de me connaitre bien sur. Nous étions le 13… et j’étais l’homme le plus heureux du monde ! En quelques jours j’avais connu l’amour… et j’espérais bien que cela dur.

Lorsque je montais sur scène, je manquais de faire tomber le micro, non en plus il ne cachait pas son aura terrifiante, mais… il me regardait comme si j’étais sur le point de commettre un meurtre. Je me sentais mal à l’aise mais repris mes esprits pour ne pas perturbée tout ce beau monde et poursuivre le show. Mieux valait que je l’évite et fasse comme si de rien était. Je chantais quelques classiques des numéros un et quelques chansons qui me plaisaient bien et qui étaient assez récentes avant de descendre de la scène me faire aborder par quelques demoiselles. Malheureusement mon cœur était déjà pris, j’étais navré mais… je ne pouvais le dire ou le laisser voir j’esquivais juste la question.

Les projecteurs me faisaient vraiment l’effet d’un chauffage ! Malgré le froid dehors et la pluie, je ne pouvais pas vraiment ressentir, mais ma peau humaine était quelque peu dégradée, laissant apparaitre quelques signes de chaleur, notamment le fait que j’étais « brillant » et j’en profitais, comme une excuse pour me rendre aux toilettes et m’asperger d’eau. J’étais en tee shirt, ce qui trahissait surement le fait que je ne craignais pas le froid et je ne me doutais pas un seul instant que ce jeune homme, ou plutôt cet Aion étrange m’avait senti. Je trainais souvent avec Andreas et je savais que les aions n’étaient pas tous comme lui. Je les comprenais… et parfois je désapprouvais totalement les gestes de mes frères anges… le fait qu’ils punissent des êtres innocents, des êtres qui sont nés sans rien demandé… ainsi que leur famille… comment voulez-vous qu’un aion grandisse et devienne une personne honorable en sachant qu’il n’a aucune famille vivante en principe et que les fautifs sont tout comme lui des entités surnaturelles hm ?

Je sifflotais tranquillement en me lavant les mains, les cordes de ma guitare ayant légèrement fait chauffé un peu plus ces dernières, puis les sécha sans rien dire. Il y avait quelque chose d’étrange, d’une j’étais préoccupé par ce jeune homme, de deux… il n’y avait que moi dans la salle, pourtant il y avait plusieurs cabines… et pour finir, un silence à vous glacer le sang. Lorsque je m’en aperçu… c’était comme si j’étais dans un film. La porte s’ouvrit sur l’aion, son regard effrayant posé sur moi. J’essayais de faire comme si de rien n’était mais… j’imagine qu’il voulait surement me parler, j’étais le seul ange à être dans les parages… et il n’y avait pas de démon à ce que j’avais cru comprendre alors… est-ce qu’il y avait une raison valable ? J’espérais bien que non, que mon imagination me jouait des tours… mais à le regarder… j’en avais de moins en moins l’impression. Je tentais alors… un…

« Bonsoir ? »

Spoiler:

Même si travailler dans un restaurant ne me faisait pas particulièrement plaisir, d'autant plus que passer autant de temps au milieu d'autant d'humains, ce n'était pas ce que je voulais pour moi-même, cet endroit me permettait de souffler un peu. En général, les anges et les démons n'y allaient pas trop. Enfin, jusqu'ici, je n'en avais pas vu un seul, donc tout allait bien. En fait, ce n'était pas que j'étais du genre à les fuir. Bien au contraire, fuir était contre ma nature, je ne supportais pas ça. Mais être ici me permettait de me reposer, de ne pas être tout le temps en stress de croiser une créature surnaturelle, même si en affronter une me faisait se sentir encore plus vivant que jamais. Ici, je laissais mes pouvoirs se reposer, et je laissais moi-même se reposer. D'autant plus que le fait de ne pas contrôler mon aura me permettait de récupérer beaucoup plus vite. A côté de tout ce monde surnaturel auquel j'appartenais, passer quelques heures au milieu d'un brouhaha incessant produit par les humains ne me dérangeait pas. Loin de là. Même si j'avoue que devoir servir les volontés de ceux-ci, ça n'était pas franchement génial. Je me fichais des humains, mais tout de même, il ne fallait pas pousser...

Ceci étant, ce soir était particulièrement calme. On m'avait prévenu qu'un homme viendrait effectuer quelques morceaux de chansons, et à force de travailler ici, j'avais compris que ces soirées-là étaient les plus calmes puisque les clients avaient l'habitude de rester silencieux ou de parler tout bas. Par contre, j'avoue que le silence, surtout dans un endroit bondé, avait le don de me mettre affreusement mal à l'aise, voire carrément de m'effrayer. A se demander si un partie de mon enfance n'était pas encore restée avec moi, ce qui me tapait plus sur les nerfs qu'autre chose.

Je passai un chiffon sur une table de nouveau libérée par une petite famille qui venait de payer et replaçai quelques couverts dessus. Je jetais un coup d'oeil à ladite famille, un air de nostalgie me venant soudain. J'aurai vraiment tout donné pour avoir une vie comme celle-là. Enfin... Je ne pense pas que je devrais vraiment y penser. Si je m'étais promis d'oublier tout ce que j'avais vécu et de l'enfouir au plus profond de ma mémoire, ce n'était pas pour rien. Je profitai d'un moment de tranquillité pour aller relever la commande de nouveaux clients quand je sentis quelque chose qui me fit frissonner jusqu'au bout des doigts. Autour de moi, je sentis mon aura s'agiter tandis que mes yeux noisettes vinrent d'eux-mêmes se poser sur la petite scène sur le côté du restaurant. Je n'étais pas le seul à regarder le nouvel arrivant, un jeune homme qui semblait avoir mon âge environ, mais ce n'était pas pour les mêmes raisons. Je fronçais les sourcils, fixant ce gars-là d'un regard noir. Lui n'était pas humain. Et je sentais la même aura que la mienne, en beaucoup moins prononcé sur lui. Pourtant, ça n'était pas un aïon, je le sentais aussi, ce n'était qu'une espèce d'empreinte d'aïon sur lui. Je serrais les poings, tremblant de rage. J'étais persuadé que celui-là venait de tuer un aïon. Il n'y avait pas d'autres alternative, non ? Je sentis mon aura frémir sans y faire attention, mais sursautai quand les clients dont je m'occupais firent revenir mon esprit sur terre. Un peu à l'ouest, je pris rapidement note de ce qu'ils désiraient avant de filer en cuisine. J'étais perturbé.

D'habitude, je n'aurai pas hésiter à l'attaquer d'office, ange ou démon, qu'importe ce qu'il était. Même si l'endroit était plein de témoins. Mais peut-être que le fait qu'il ait tué un de mes semblables - j'en étais sûr à présent - m'affectait. Au fond de moi, je sentis une rage sans nom s'animer. Je passai une main sur mon visage en soupirant. Je pense qu'il allait falloir attendre le bon moment pour agir. Non, je ne pouvais laisser celui-là filer après ce qu'il avait fait. Je ressortis des cuisines lorsque je vis ma proie descendre de scène et se diriger vers les toilettes des hommes. Même si l'endroit était trop confiné pour que je laisse sortir mes pouvoirs comme cela me chantait, je sentais bien que c'était maintenant qu'il fallait agir. Je lui emboîtai le pas, à quelques mètres de lui, et j'attendis quelques minutes avant de rentrer à l'intérieur. Tremblant toujours de rage, je refermai le plus doucement la porte tout en le fixant d'un regard plein de haine.

Mais son "bonjour" faillit me déstabiliser. Sur le coup, je haussai un sourcil d'incompréhension. Est-ce qu'il se rendait compte que j'étais sur le point d'essayer d'attenter à ses jours, là ? Enfin, je ne réfléchis pas trop. D'un geste anormalement rapide, je me rapprochai de lui en le plaquant contre le mur, l'un de mes poings serrant le col de son tee-shirt noir.

« Ne te fous pas de moi... je sais ce que t'as fait, alors inutile de faire l'innocent. »

Je sentis mes pouvoirs s'agiter, la tension dans l'air devenant de plus en plus lourde. Autour de moi, sous l'effet de la colère, mon aura devait être franchement impressionnante, et pouvait presque alerter les créatures surnaturelles en dehors du restaurant, mais je ne m'en formalisai pas. Je serrai les dents, m'empêchant de laisser sortir toutes mes émotions d'un coup.

« Ca vous amuse vraiment, de nous tuer, tous, un par un ? Est-ce qu'on est venu vous demander quelque chose ? »

Qu'importe sa réponse, j'étais décidé à le tuer. Peut-être que je n'étais pas de taille contre lui, mais qu'importe. J'eus une pensée pour Tomoya, qui m'aurait sûrement calmé sans problèmes... Mais là, je me fichai bien de vivre ou mourir.

Je sentais comme une aura malsaine dans l’air, il avait l’air en colère, ses poings serrés et son visage fermé en témoignaient d’ailleurs. Je ne pouvais que le comprendre, mais me faire sauter dessus après avoir dit « bonsoir » je ne m’y attendais pas, apparemment cet Aion là n’était pas vraiment ouvert à la discussion et je le laissais donc parler et déverser un peu sa haine contre moi… sans rien faire pour ne pas le contrarier davantage. Je n’osais rien dire… qu’est-ce que je devais faire dans un moment pareil ? J’ai tellement peu l’habitude que l’on m’attaque ces derniers temps que c’était inquiétant. Je devais reprendre un peu la main peut-être ? Non… ce serait contre mes principes.

Il était puissant, je le sentais et d’ailleurs son aura était si violente que j’aurais pu m’étouffer si je n’avais pas été en mesure de le supporter. J’affichais un air désolé, compréhensif, au mieux, même si je n’avais surement pas enduré le quart de ce qu’il avait vécu… quand je vois Andreas, je me dis qu’il est chanceux dans un sens… Andreas… mais oui ! Il a du sentir son aura ! Ah… c’est donc ça qui l’a énervé ? Mieux vaut dire les choses avec tact.

« Je n’ai jamais tué d’Aion… et j’espère n’avoir à jamais le faire. L’aura que tu as du sentir sur moi est celle de mon meilleur ami qui est de la même espèce. S’il te plait… ne fat pas la bêtise de me tuer… je n’ai rien fait de mal ! »

Je lui avouais à la fois que je ne suivais pas tous les ordres qu’on m’avait donnés, et que j’étais bien plus proche de lui que de mes frères anges. Je me mordis la lèvre, essayant juste de délier ses mains de sur mon tee-shirt, calmement et très lentement.

« Je ne sais pas ce que tu as vécu… mais je peux comprendre pourquoi tu as réagi ainsi, seulement, je ne te veux aucun mal… alors… évitons de nous battre, ce serait dommage d’utiliser nos forces pour une bataille inutile hein ? »

Je ne savais pas vraiment quoi faire pour détendre l’atmosphère, c’était assez étrange par ailleurs, car… plus j’essayais de le calmer, et plus j’avais l’impression que sa puissance diminuait, mais elle atteint tout de même une certaine stabilité, qu’était-ce ? Un pouvoir étrange ? Quoi qu’il en soit, il fallait que je trouve quelque chose à faire ou à dire et très vite ! Ah, je sais !

« Il est sans doute un peu tard pour les présentations mais… je m’appelle Chul Hei, enchanté ? »

Je lui tendis ma main, espérant qu’il la saisisse, jouant la carte de l’humour, celle que j’utilisais le plus souvent, mais parce que j’étais un ange, souvent on me disait que c’état rapé, à cause de ma calme attitude… vraiment, j’espérais que ça marcherait, avec un sourire radieux peut-être ? Enfin… quoi qu’un peu pincé, mais j’étais très mal à l’aise, il venait littéralement de me sauter dessus pour sauver sa peau et il tombait nez à nez avec un ange qui ne tue pas les aions… avouons que c’était extrêmement rare et s’il ne me prenait pas pour un traitre ce serait un vrai miracle, même si je n’en étais pas un, comme dis précédemment, les anges qui refusent de tuer des aions sont rares !

« Hm… vraiment je suis désolé que tu m’ais cru comme les autres… je ne peux malheureusement pas coller sur mon front ma différence au risque de me faire tuer à mon tour… alors je t’en pris, oublions ce mal entendu et essayons plutôt de nous entendre, ne ? »

J’avas du mal à lui parler en japonais, alors… j’essayais parfois de caser du coréen, c’état étrange, mais au moins il pourrait comprendre qu’en plus de ça, je ne suis pas un ange japonais ! Ah… j’espérais vraiment qu’il comprendrait, sans mes amis, je suis perdu dans cette langue ! Il fallait vraiment que je travaille dur pour me perfectionner !

Un vieil homme entra alors et je me mordis la lèvre en le voyant nous dévisager ainsi. Il nous avait salués, puis… s’était enfermé dans une cabine, est-ce que nous pouvions nous permettre de poursuivre la conversation ici ? J’en doutais, aussi… je remarquais qu’il portait des vêtements de serveur et je compris alors qu’il devait être en pause.

« On pourrait poursuivre notre conversation plus tard ? Qu’en dis-tu ? Je vois que tu travaille et je ne vais pas te déranger, je vais moi-même retourner sur scène, alors… on se revoit après ? »

Je n’étais pas un trouillard et en lui proposant de se voir après, forcément je lui montrais que je n’allais pas fuir, j’essayas de soutenir son regard, comme pour lui montrer qu’il n’y avait rien de mauvais en moi, mais comme chez toute personne aion, démon, humain, toutes races confondues, il y avait parfois des jugements faussés par un quelconque sentiment, par l’expérience aussi… soit, je décidais de ne pas bouger, attendant qu’il me donne une réponse avant de faire quoi que ce sot, au risque de me retrouver de nouveau plaqué contre un mur.

Spoiler:

Au fond de moi, je ressentais cette impression habituelle à chaque fois que j'apercevais un ange ou un démon. Colère. Envie. Vengeance. Haine. Est-ce que c'était injuste de juger toute une race entière rien qu'à cause d'un peu moins d'une centaine d'entre eux, ce qui ne représentait qu'une infime part, avait essayé de me tuer pour une simple chose dont je n'étais même pas responsable, mon existence ? Laissez-moi vous dire que je m'en fiche totalement. Pour moi, ils étaient tous pareils. Ils étaient tous venus, ils m'avaient tous traqué pour la même chose, alors pourquoi est-ce qu'il y en aurait des différents ? Et pourtant... Je ne pouvais m'empêcher de penser que l'ange que j'avais en face de moi n'était pas exactement semblable à ses congénères. Rien que le fait de me saluer comme ça m'avait paru bizarre. Un ange ne salue pas un aïon, il le tue sans faire d'histoires... non ? ... Non, vraiment, reprends-toi Ji Hoon. Tu as en face de toi un "soldat de Dieu" comme ils s'appelaient aussi, il n'y avait aucune différence à faire. Comme pour me convaincre de ce que je pensais, je resserrai ma prise sur son tee-shirt noir tout en appuyant un peu plus avec mon bras. C'était maintenant que je devais agir. Je me fichais bien que quelqu'un puisse rentrer à ce moment-là dans les toilettes du restaurant, qu'importe ce qu'il verrait. Je pinçai mes lèvres sous l'effet de la frustration, plantant mes yeux amandes dans ceux de l'ange. J'hésitais. Ce n'était pas normal. Peut-être parce que ce que je voyais dans les yeux de mon vis-à-vis n'était pas habituel pour quelqu'un de son espèce quand je croisais son regard ? Non, vraiment, il y avait quelque chose de différent.

Après un temps qui me parut interminable, ce qu'il me dit me déstabilisa encore plus que son "bonsoir" d'il y a quelques minutes. Un ange qui ne suit pas les ordres, j'aurais tout vu moi... Mais il y avait quelque chose de louche. Un aïon meilleur ami avec un ange. Ce n'était pas parce que la notion de "meilleur ami" ou même "d'ami" n'était pas vraiment connu chez moi que cela me choquait, mais bien la différence de race. Comme si c'était possible. Vraiment, je n'y crus pas une seule seconde, mais cela me fit encore plus hésiter. Néanmoins, passif, je me laissais totalement faire lorsqu'il saisit mes mains pour les éloigner de lui-même, mes yeux fixés sur lui mais à la fois un peu perdu dans le vague, ne sachant que faire.

Je ne savais pas ce qu'il me faisait, mais j'avais l'impression de me calmer peu à peu, comme mes pouvoirs qui redevenaient stables, à l'image de mon aura. Finalement, je ne reculai pas mais remis mes bras le long de mon corps, sans l'attaquer une seconde fois, mais je le fixais toujours silencieusement avec méfiance, comme si j'essayais de le décrypter, de savoir s'il me disait vrai ou non. Je fixais alors sa main tendue, me demandant quoi faire. Si je la serrais, ça monterait que je lui faisais confiance, or c'était loin d'être le cas. Sur cette pensée, je le gratifiais encore une fois d'un regard méfiant et dédaigneux, mais je ne bougeais toujours pas et je ne pris même pas la peine de lui serrer la main. Je ne savais vraiment pas à quoi m'attendre avec lui, alors sait-on jamais... Je ne savais pas si chez moi, c'était censé être rassurant ou pas... Après tout, ce n'était pas l'envie de le plaquer à nouveau contre le mur qui me manquait, donc je ne savais vraiment pas d'où me venait cette hésitation qui me tapait plus sur les nerfs qu'autre chose.

Il n'empêche que tout ce qu'il me disait, avec un accent coréen très semblable au mien, semblait cohérent... Je me passai la langue sur les lèvres, l'air pensif. Non, vraiment, je ne pouvais pas le laisser passer, qui me dit qu'il n'en avait pas tué un, d'aïon ? J'avais bien appris à ne jamais faire confiance à quelconque créature surnaturelle et même aux humains... Alors rien ne me garantissait qu'il ne me mentait pas.

« Je... je ne fais pas ça à n'importe quel ange ou démon que je croise, alors... j'ai une pause dans vingt minutes, dehors, derrière le restaurant. »

Et tandis que je maudis mon bégaiement absolument inhabituel de ma part qui trahissait mon hésitation, je lui lançai un dernier regard méprisant avant de me retourner sans adresser un mot à l'homme qui venait de rentrer dans la pièce. Heureusement (ou malheureusement, mais ça ne faisait pas trop de différences pour moi) pour le dénommé Chul Hei, l'homme en question n'avait pas l'air d'avoir entendu les mots "démon" et "ange" ou tout autre chose de la conversation puisqu'il semblait plus occupé à essayer de se faire tout petit. En ce qui me concernait, si les humains apprenaient l'existence de tout un monde qui se faisait la guerre en plein sur leurs terres, ça n'était pas mon problème mais le leur.

Je ressortis de la pièce et reprenais alors mon service en n'ayant qu'une chose en tête : cet ange. Sérieusement... Pourquoi je ne l'avais pas tué, comme je le faisais d'habitude ? Rien ne me gênait habituellement, que ça soit les témoins ou encore la place disponible pour laisser mes pouvoirs sortir comme bon leur semblait, alors pourquoi ? De temps en temps, je lançai un regard en coin sans aucune émotion perceptible à l'ange qui était de retour sur scène. Ca pouvait toujours lui prendre de ne pas tenir parole et de me sauter dessus à tous moments... Et je n'étais pas paranoïaque.

Après les vingt minutes dont il était question, je débarrassai une dernière table près de la scène et je regardai à nouveau mon vis-à-vis pour lui faire comprendre qu'il était temps d'avoir une discussion et que je méritai quelques explications... Et pas des mensonges. Je ne le croyais pas. Enfin... En vérité, je ne savais pas trop quoi penser. Pas spécialement impatient de la pause mouvementée qui m'attendait, j'ouvris la porte des cuisines qui donnait sur la ruelle derrière de restaurant et j'attendais quelques minutes, les yeux fermés, jusqu'à ce que j'entende la porte à côté de moi se rouvrir. Sans ouvrir mes orbes de couleur marron, bridées pour prouver mon appartenance à ce continent qu'était l'Asie, je ne fis aucune effort pour cacher le mépris dans ma voix, même si je semblais un peu plus calme que l'épisode dans les toilettes, pour mon plus grand déplaisir.

« Alors... qui me dit que je peux vraiment te croire sur parole ? Ca ne serait pas la première fois qu'un ange me ment... Je me suis fait avoir petit, pas maintenant. »

Il était… indifférent, son visage aussi inexpressif que le mien me perturbait et je comprenais maintenant ce que les gens ressentaient en face de ce genre de personnes… en face de moi, parfois. J’étais assez nerveux intérieurement de savoir qu’il aurait pu me tuer et surtout qu’il ne me laissait rien voir, ce serait la pire des morts pour moi, mourir dans l’indifférence et l’irrespect, puisque je doute qu’avec la haine qu’il porte à ceux de ma race, il m’accorde au moins quelques jours pour dire au revoir… ou simplement une parole à transmettre. Je déglutis difficilement, prenant sur moi pour lui tendre la main, j’avais tellement envie de lui prouver ma bonne foi que… j’en perdais mes moyens.

Comme je m’en étais douté il n’avait pas saisie ma main je lui avais demandé si l’on pouvait se retrouver après son service, histoire qu’il n’y ait pas de témoins et qu’il ne perde pas son boulot à cause de moi et il avait accepté, se méfiant de moi comme de la peste. Je voulais bien le comprendre et me radouci à mon tour, grimpant une nouvelle fois sur la scène en regardant dans sa direction, ce qui faisait aussi. Les gens étaient content pourtant… même si d’ordinaire cela suffisait à me mettre du baume au cœur, j’étais trop préoccupé par l’aion pour me soucier d’autre chose.

Quand finalement les 20 minutes qui me parurent extrêmement courtent s’étaient écoulées, je le suivis dans la cuisine, puis finalement dehors, il m’attendait… forcément, il n’avait pas ouvert les yeux si ce n’est au dernier moment, lorsque le silence reprit ses droits. J’étais surpris, il était calme et pourtant s’adressait à moi d’un ton qui ne me plaisait pas trop… mais je ne protestais pas, il devait avoir ses raisons et je les respectais.

« Pour commencer… je n’ai pas tenté de te tuer une seule fois… je n’ai pas riposté alors que tu comptais faire de moi de la chair à saucisse hm… et j’ai tenu parole en venant parler avec toi pendant ta pause ? C’est déjà un bon début ? »

Je lui souris malgré tout, assez embarrassé, mais au moins je faisais l’effort de lui montrer que je ne lu voulais aucun mal, quand à prouver ma parole, je ne sais pas… comment est-ce que je peux faire pour qu’il ne me prenne ni pour un traitre, n pour un malhonnête qui risquerait de le dénoncer, non vraiment… je ne savais absolument pas.

« Comment est-ce que je dois t’appeler ? Tu connais mon nom et j’aimerais connaitre le tien, ne te sens pas obligé bien sur, mais… c’est un juste retour des choses »

Je me grattais la nuque, déstabilisé face à un jeune homme si calme. On aurait presque dit qu’il était sans vie et j’aurais tout fait pour lui redonner gout, mais je doute qu’il me fasse confiance à ce point, d’ailleurs, il m’avait juste cru jusqu’ici et je trouvais ça déjà bien. À vrai dire, je m’étais de nombreuses fois trouvé dans des cas similaire, mais comme je ne sautais pas sur les gens… généralement c’était moi qui me prenais les coups et j’essayais juste de fuir, me refusant de tuer… ça ne s’était pas tout à fait passé comme ça avec Andreas, puisqu’il était comme moi je pense sur ce point là et rien que d’y penser, me faisait sourire.

« Qu’est-ce que je peux faire pour te prouver que je ne comptes pas te tuer ou te dénoncer ? J’aimerais vraiment que tu me fasses confiance sur ce point là… j’aimerais aussi… pouvoir t’aider »

C’était assez soudain, je l’avoue, mais… c’était aussi dans ma nature. J’étais un ange après tout, ne pas lui tendre la main n’était pas dans mes principes même s’il l’avait refusé ! Je la lui tendrais toujours. Et puis, il m’a épargné malgré sa force… c’était déjà beaucoup !

« Si… au moins on pouvait éviter de se sauter dessus à chaque fois qu’on se croisera ? Tokyo est une grande ville, mais ton aura est facilement perceptible, tu devrais faire attention »

Je me mordis la lèvre, puis mis mes mains dans les poches de mon pantalon, récupérant un petit flacon avec des sortes de fraises… tien, je l’avais oublié ! Avec un petit sourire, je débouchais doucement la fiole, m’inquiétant en sentant le regard pesant de mon nouvel ami sur moi, comme s’il s’agissait d’un détonateur, d’une bombe, d’une mine, que sais-je. Je lui montrais tout simplement le contenu et prenait quelques fraises pour les mettre dans ma bouche et mâcher. Je lui tendis le reste, savourant les sucreries. Je sautillais tantôt sur mes talons, tantôt sur mes pointes tant ces bonbons avaient un goût délicieux ! Une explosion de saveur, le sucre et la douceur de la sucrerie qui fondait, le moelleux, aucune acidité et un arrière goût très léger de je ne sais quoi qui faisait tout !

« Je viens d’en manger, ça prouve que tu ne risques rien et puis… qui sait, c’est peut-être magique ? Tu te sentiras peut-être mieux ! »

Et je ne croyais pas si bien dire, aussitôt je souriais comme un idiot. Je n’arrivais pas à effacer mon sourire, même si la situation était plutôt tendue et je commençais à m’inquiéter, mais… au fond, c’était très amusant de savoir que je souriais malgré moi. Ce n’était que le début et je ne le savais pas encore… mais ces bonbons spéciaux allaient me faire passer une soirée très étrange en la compagnie d’un jeune homme… lui aussi très étrange que j’avais envie d’aider.

Ces vingt minutes pour moi, je ne savais pas trop si elles furent longues ou le contraire. D'un côté, j'avais envie de savoir ce qui passait par la tête de cet ange - bizarrement, l'appeler Chul Hei ne me plaisait pas des masses, allez comprendre pourquoi. Non, vraiment... Pourquoi est-ce qu'il n'avait pas essayé de se défendre un minimum, ça aurait pu être facile pour lui, quelque que soit son niveau, au lieu d'essayer de régler tout ça rien qu'avec des mots. Tout le contraire de moi, en somme. Je ne les comprendrais jamais, je crois. J'avais aussi envie de ressentir un peu d'excitation qui n'était pas trop au rendez-vous ces temps-ci... donc une attaque n'allait pas me déranger, au contraire. Mais d'un autre côté, je ne connaissais rien de lui et si je commençais à lui faire confiance, ce qui ne risquerait pas vraiment d'arriver, il y a des chances, beaucoup, que ça se retourne contre moi et... même si c'était à tenter comme expérience, je n'en avais pas spécialement envie. Mais c'est vrai que dit comme ça, si les choses tournaient mal... ça n'était pas très dérangeant, non ?

Je finissais heureusement mon service et profitais donc de ma courte pause pour me retrouver dehors, dans la rue sombre derrière le restaurant. La porte à mes côtés ne tarda pas à se rouvrir, mais je ne bronchai pas, essayant de ne pas y faire attention. Ce n'était aps que j'avais besoin de réfléchir un peu plus avant de parler ou de me remettre les idées en place avant de le faire - aucun intérêt, non ? - mais plutôt parce que je préférais observer le comportement de l'ange... Et même si j'étais calme, je ne pouvais cacher l'espèce de mélange de mépris, de haine et d'incompréhension dans ma voix. Pour ce dernier, cela ne me ressemblait pas trop, j'avais l'air perdu, déstabilisé et Dieu (veuillez m'excuser pour le blasphème...) sait que j'en avais horreur.

Lorsqu'il finit par me répondre, j'ouvris doucement les yeux en tournant à demi la tête pour le regarder bien en face. De plus, je devais avouer qu'il n'avait pas tort, mais plutôt mourir que de lui dire, non mais... Il fallait être absolument taré pour parler de son état d'esprit à un ange... Mais malgré tout, je n'étais pas non plus totalement convaincu. Soit il jouait la comédie, soit non. Reste à savoir laquelle des deux options est la bonne. Mais honnêtement, je ne m'attendais pas du tout à ce qu'on me demande mon nom. Après tout, quand quelqu'un essaie de vous tuer ou vice-versa, ça vous arrive souvent de prendre le nom de votre adversaire ? Et pour ce qui est du reste, je leur donnais également rarement mon nom, alors... Un peu gêné, je regardais ailleurs un moment.

« A... Appelle-moi Ji Hoon... »

Cette soirée était en train de devenir l'une des soirées que je détestais le plus dans toutes celles que j'avais vécu. Vraiment, bégayer pour donner son nom... L'ange ne m'intimidait pas, mais j'étais gêné de l'avoir attaquer comme ça alors que son comportement était tout sauf enclin à vouloir me massacrer. Mais il régnait toujours une lueur de méfiance et paranoïa au fond de moi. Enfin, si je lui avais donné mon nom... Je ne pense pas que c'était absolument rien.

« Qu’est-ce que je peux faire pour te prouver que je ne comptes pas te tuer ou te dénoncer ? J’aimerais vraiment que tu me fasses confiance sur ce point là… j’aimerais aussi… pouvoir t’aider. »

... m'aider ? M'aider à quoi ? A tuer ses semblables et ses ennemis ? S'il voulait me rallier à leur cause, c'était perdu d'avance, alors quoi ?

« M'aider ? Mais... m'aider à quoi au juste ? »

Je m'étais redressé, décollant mon dos du mur, mais je ne bougeais pas de là où j'étais. Je laissais échapper un léger soupir pour bien montrer que contrôler mon aura était bien le cadet de mes soucis, si soucis il y avait. Mon aura, je n'y touchais pratiquement jamais, je la laissais comme elle était, circuler autour de moi au lieu de la contenir. Néanmoins, ce bruit aurait peut-être pu lui montrer que je l'attaquera peut-être pas au beau milieu de la capitale japonaise ou autre part. Quoique, s'il ne me connaissait que depuis moins d'une heure, pas sûr qu'il puisse arriver à cette conclusion.

Je pris un air très sceptique lorsqu'il me tendit une petite fiole presque remplie de petits bonbons, dont certains avaient déjà été installé. Je n'avais qu'une question, pourquoi ? Je ne voyais pas trop en quoi de simples bonbons pouvaient nous aider à maîtriser "cette petite dispute avec un presque inconnu". Réticent, je me saisis de la fiole et par simple curiosité, j'en avalais le même nombre que mon interlocuteur. Je n'avais aucune idée de ce que c'était, mais bizarrement, à peine après un bouffé, je me sentis différent. Un sourire affreusement niais sur le visage, je laissais échapper un petit rire tout ce qu'il y avait de plus normal.

« Au fait... désolé pour t'avoir sauté dessus, j'aurai peut-être pas du. »

Je fis le même petit rire que précédemment... Mais au fond de moi, je me demandais ce qui se passait. Ses bonbons, c'était de la drogue cachée, ou quoi ?! Finalement, incapable de me retenir, j'éclatais d'un grand rire pendant environ une minute avant de me calmer et de respirer un grand coup, le sourire au lèvres. J'étais devenu fou ou quoi ?

J’étais assez surpris, de nouveau l’aion avait bégayé son nom et pourtant, il n’avait pas l’air intimidé par moi ? Non… il aurait pu me tuer après tout et je n’avais pas réagi. Je lui souris pour lu confirmer en quelque sorte que je n’allais pas me moquer et que j’étais plutôt content qu’il daigne me céder son nom.

« Enchanté Ji Hoon, tu es… toi aussi coréen n’est-ce pas ? La vie à Tokyo te plait ? »

Je ne voulais pas qu’il croit que j’étais en quête d’informations sur lui, après tout je l’avais croisé par hasard, mais sait-on jamais, je connais que trop bien les aions pour savoir qu’ils étaient plus méfiant qu’anges et démons réunis ! Enfin, cela dit il y avait de quoi, même si j’aurais voulu qu’il comprenne que je n’allais pas le tuer et ce, dès le premier échange de regards !

J’étais assez nerveux, mal à l’aise, ça ne me ressemblait pas mais c’était peut-être normal après tout avec Ji Hoon et je ne voudrais pas qu’il ressente la même chose que moi alors, je lui proposais mon aide et ça ne lui plu pas tellement. Je fis la grimace, essayant de me rattraper.

« Je ne sais pas… à ce que tu ais la paix en quelque sorte ? Ne t’affole pas, je ne te proposerais pas la mort, non je veux dire… à ce que les anges et les démons puissent te laisser tranquille, ce serait… mieux, n’est-ce pas ? »

J’avais surement anticipé ce qu’il avait pensé, même s’il ne l’avait peut-être pas pensé remarquez, mais dans le doute il savait que je ne l’attaquerais pas, je voulais juste le comprendre et puis pourquoi pas lui rendre la tâche facile, quand à tuer… non ça je ne l’aiderais pas, je l’en empêcherais même. J’imagine si Kanon avait été à ma place, est-ce qu’il aurait réagi de la même façon ou son instinct de soldat l’aurait poussé à se défendre et à mener la bataille ? Pourtant, Ji Hoon, avec son aura étouffante lors de l’attaque aurait pu le tuer… comme il aurait pu le faire avec moi. Mais il m’avait écouté et c’était là une bonne chose.

Quand à cacher son aura… ça, il n’avait pas l’air d’accord c’était… dommage, il ne se rendait pas la tâche facile, à croire qu’il le faisait exprès mais ce n’était que supposition. Rapidement je lui tendis quelques bonbons, la moitié de ce qu’il y avait dans la fiole et mangeait le reste en même temps, je savais qu’il n’aurait pas accepté si je n’avais pas mangé en premier. Il se mit à sourire et moi aussi, tout naturellement. Puis me répondit qu’il était désolé de m’avoir attaqué avant d’éclater de rire, ce qui me fit rire moi aussi sans que je ne sache pourquoi ;

« Ha ! Ce n’est rien, l’important c’est de m’avoir épargné n’est-ce pas ? je te remercie de m’avoir écouté ! »

Je me mis à rire moi aussi une nouvelle fois, essuyant quelques larmes aux bords de mes yeux avant de reprendre mon calme et de souffler un bon coup. C’était… surprenant, est-ce que c’était l’effet des sucreries ? Non… je ne pense pas… mais en regardant la bouteille, après tout… peut-être qu’il s’agissait de mets spéciaux ?

« Tu sais Ji Hoon… j’ai un ami ange qui est totalement pacifiste lui aussi, mais s’il avait été à ma place tu l’aurais tué parce qu’il se serait peut-être défendu… c’est tellement dommage ! Tu es fort et je ne doute pas que tu sois intelligent, alors use de sagesse plus que de tes poings ! Bien sur ce n’est qu’un conseil, je n’ai pas d’ordre à te donner »

Moi-même je ne me considérais pas comme un exemple, je n’avais pas tué, mais j’avais suivi des ordres qui ne me plaisaient pas, je n’avais pas dénoncé, mais j’avais été obligé parfois de me battre pour sauver ma vie et même si ça m’avait déplu parfois, certaines personnes allaient si loin que seule la mort était l’issue… j’avais survécu, mais je n’oublierais jamais toutes ces vies que j’ai prise sans le vouloir. Je riais, idiot que j’étais, même si je n’en avais pas vraiment envie, je riais et souriais comme un idiot… et puisque Ji Hoon faisait pareil… mieux valait l’avertir avant de me faire tuer.

« Concernant nos fous rire je… même si ça fait du bien de rire héhéhé… je crois que… c’est les bonbons, mais je t’assure que je n’y suis pour rien, je n’en savais rien ! Hahahaha ! »

Et bien vite je mis ma main devant ma bouche pour réprimer un rire très fort qui se transforma en fou rire avant de me plier en deux pour pouvoir souffler un peu, atterrissant même dans des cagettes. J’en pris une pour Ji Hoon la lui tendit et sourit, restant donc en position assise pour pouvoir contrôler au mieux mes crises de fou rire.

« Je suis désolé… haha… promis il n’y a pas d’effet caché dans cette cagette, je ne connais pas l’endroit ! hahaha ! »

Me mordant la lèvre, je regardais en l’air pour essayer de ne pas rire puis, soufflais un bon coup en reprenant le courant de mes pensées. Je n’avais qu’une seule chose en tête maintenant, comme une obsession : aider cet aion à voir la vie du bon côté.

« On se connait depuis peu, d’ailleurs on ne peut pas vraiment dire qu’on se connait n’est-ce pas ? héhéhé, mais si tu as envie de parler avec moi ou tout simplement qu’on se voit, tu n’as qu’à m’appeler ? Je te laisse mon numéro, n’hésite pas ! »

Un ange qui se démène pour lui sans qu’il n’ait la moindre redevance, ça doit lui faire bizarre, pourtant j’étais comme ça, j’avais senti en quelque sorte sa détresse et je voulais l’aider, c’était dans ma nature et ce, quelque soit sa race, il était perdu et je ne comptais pas l’orienter ou en faire un allier, je voulais juste qu’il soit mon ami et qu’il puisse avoir une vie normal au possible, rien de plus rien de moins. Le voir sourire à été tellement choquant… que je doute qu’il sourit souvent et puis… il va surement avoir des crampes comme j’en ai souvent eu ! Hahahahaha !

« J'ai quitté la Corée pour oublier certaines choses... après dire si Tokyo me plaît, ça me paraît être un peu trop... »

J'étais toujours aussi méfiant, mais quelque part un peu gêné que quelqu'un s'intéresse autant à moi et me traite aussi bien sans aucune parole ou aucun geste d'agressivité, un ange en plus de ça ! Néanmoins, je préférais rester plutôt évasif dans mes réponses... Ce n'était pas totalement faux en plus. Je voulais oublier toute mon enfance. Mais d'une façon contradictoire, oublier mon bourreau, celle qui m'a torturé pendant dix longues années, ma mère... ça m'était impossible. Quand bien même elle avait été affreuse avec moi, je l'aimais comme un fils normal aime sa mère normal. Malsain ? Peut-être.

Enfin, après tout, il n'était pas sûr que lui, il n'aille pas rapporter quelques informations à mon sujet à ses copains à plumes, donc bon... Pas que le fait de prendre des risques me dérangeait, loin de là, qu'ils viennent à plusieurs les anges si ça leur chantent, mais tout de même... Je n'étais pas forcément obligé de lui répondre, alors... Enfin, quelque part, voir que j'arrivais à garder mon self-control en présence d'un serviteur d'un Dieu inexistant pour moi, c'était une première... Et je ne savais pas trop s'il se rendait compte que j'étripais presque tous les anges et démons que je croisais dans ma vie, sans aucune exception ou presque. Ce fait m'exaspérait un peu, mais en même temps, la présence de l'an... de... de Chul Hei avait quelque chose d'étrange, d'apaisant, et il ne suffisait vraiment pas de me connaître pour savoir que j'étais quelqu'un de tout sauf calme. Rien qu'à voir là, adossé au mur, mais je ne restais pas plus de deux secondes sans bouger d'un poil... Je me demande si je ne souffrais pas d'une hyperactivité... Au point où j'en suis, ça n'était pas tellement grave.

C'est alors que le plus grand fou rire de ma vie me prenait. En même temps, c'était pas comme si j'étais du genre à rire beaucoup, même en temps normal où je jouais le gars un peu je-m'en-foutiste, gentiment moqueur, mais qui avait l'air sympathique. (Ou pas, hein... mais on fait ce qu'on veut.) Mais juste... C'était quoi ça, exactement ?! C'était pas normal d'être pris d'une hystérie pareille, surtout venant de moi dans une situation comme celle-là. Pris d'un soudain mal de ventre à force d'avoir trop ris, je me tenais les côtés avec une main, l'autre autant occupée à me maintenir debout à l'aide du mur à mes côtés. J'essayais de reprendre mon souffle et de me calmer, mais j'avais toujours le sourire aux lèvres et j'étais parfois secoué de légers tremblements qui trahissait le fait que l'envie de rire était toujours là.

Un peu suspicieux, mon regard glissa vers la fiole vide entre les mains de ma nouvelle connaissance qui était un peu dans le même état que moi. Euuuuuh... Est-ce que ça existe les bonbons drogués maintenant ? Non mais on mets de la drogue vraiment n'importe où maintenant... Néanmoins, je pensais alors au fait que l'ange aurait pu éventuellement faire ça exprès pour essayer d'apprendre quelques trucs sur moi au passage... Paranoïaque, moi ? Oui, un peu, ça vous dérange peut-être ? Toujours un peu dans les vapes, comme si j'étais devenu totalement fou en l'espace d'environ seulement deux minutes avant de redevenir quelqu'un de tout à fait censé (sauf que je n'étais pas quelqu'un de censé en temps normal, il parait...), je m'appuyais contre le mur en essayant de reprendre mon calme, mes yeux allant vers l'ange. Je ne réagis pas lorsqu'il me "conseilla" d'utiliser ma tête plutôt que mes poings... Cela faisait à peu près douze ans que j'agissais de cette manière, je ne pense pas que ça pourrait changer aussi facilement.

Il n'empêche que j'avais toujours un sourire tout à fait idiot dessiné sur les lèvres.

« Franchement, j'y crois vraiment pas... un ange qui transporte des substances illégales sans le savoir... »

Ce n'était qu'une simple plaisanterie, à vrai dire, mais si on m'avait dit un jour que j'allais plaisanter avec un ange, laissez-moi vous dire que je vous aurais sûrement frappé sur le coup. Mais vraiment... il m'arrivait certaines choses étranges aujourd'hui. Je ne pouvais pas apprécier la compagnie d'un ange, non, vraiment... Ca n'était pas possible... non ?

Peu à peu, j'arrivais à reprendre mon sérieux, tandis que je fixais un ange par terre qui avait l'air totalement bourré d'un air légèrement moqueur, mais rien de bien méchant. C'est un peu ce qui m'inquiétait d'ailleurs... Ceci étant... L'ange en question avait l'air de s'en faire pour moi, et ça, c'était à se demander s'il n'y avait pas un ange ou un démon assez puissant qui était en train de nous influencer depuis notre rencontre, ce qui ne m'étonnerait pas trop.

« Eh... vraiment, pourquoi... Pourquoi ? Pourquoi tu veux en faire autant pour moi ? »

J'avais une envie de rajouter un : "Tu t'es égaré du lumineux chemin divin ?", mais je m'abstenais. Mais j'étais perdue. Je ne savais vraiment pas quoi penser maintenant. Je devais avoir l'air d'un gamin perdu, un gars à peine adulte de vingt-deux ans qui l'était devenu trop tôt et qui ne savait pas quoi faire de sa pauvre vie affreusement inutile.

« J'veux dire... C'était pas comme si je te faisais totalement confiance, voire pas du tout... Mais quand même, pour tes copains comme pour le clan opposé, je suis une pourriture, une abomination, une chose dangereuse et affreuse qu'il faut éliminer à tout prix... alors pourquoi ? »

Il était bien souriant et il ne m’en fallut pas plus pour deviner que nous étions dans le même état… en raison de mes sucreries, vraiment, je riais pour un rien et j’espérais que ça n’allait pas nous tuer et que ce n’était pas une drogue, bien que sur lui comme sur moi ce genre de chose n’altérait en rien ni nos capacités ni nos forces ! Ah… j’appris qu’il était coréen et qu’il avait en quelque sorte fuit quelque chose. Je pouvais le comprendre, rien que de repenser à ma ville, à ce qu’elle est devenue, la peur de croiser un descendant… me faisait terriblement peur. Ou de voir le nom de ma femme… de mes petits enfants… que sais-je, leur mémoire m’enchante mais me désole à la fois. Je soupire et ne peux effacer malgré moi le rictus sur mes lèvres.

« Je ne dirais pas que je comprends mais, moi aussi… je veux oublier, quelque chose que je ne pourrais jamais oublier mais… j’essaie. Tokyo n’est pas si mal pour ça, on y fait de drôle de rencontre, n’est-ce pas ? »

Je riais de nouveau et essayais de me calmer, j’avais l’impression que lorsque j’étais heureux, l’effet s’accentuait d’autant plus, que ce soit un simple sourire, un sentiment positif, c’était accentué mais… toujours incontrôlable. Ah… vraiment, ça m’apprendra à faire confiance aux gens si facilement, la pette vendeuse m’a bien eu ! Je lui revaudrais ça ! Hahaha ! Hm… je jugeais bon d’en tenir informé mon interlocuteur afin qu’il ne se méprenne pas et il me fit d’autant plus rire, me forçant à me tenir les côtes tellement je riais de sa blague, involontairement, d’ordinaire j’aurais juste souris et laissé échapper un léger rire, mais là, c’était le fou rire total !

« Ah, vraiment je suis trop naïf je crois ! Haha ! Je suis vraiment désolé ! Mais… au moins tu souris, comme ça, on est détendu ! hahaha ! »

Tout ce que je lui avais dit concernant les autres lui était passé par une oreille et ressortie par l’autre. Même si je m’étais douté de cette réaction, j’étais quand même déçu, tuer est un acte bien plus grave que sa naissance et même s’il s’agit de mes frères et parfois injustement, ce qui m’attriste, ce qui est fait et fait… je l’ai toujours dit. J’espérais juste qu’à l’avenir, il ferait un peu plus attention. Il me demanda pourquoi je voulais l’aider plutôt que de soutenir les anges et parfois les démons. Il avait l’air déstabilisé et je me contentais de lui sourire afin qu’il ne croit pas que je veuille profiter de lui.

« Tu sais… parfois je désapprouve le comportement de mes frères. Ils peuvent se montrer sans cœur… et même si la mort est un châtiment cruel, c’est ta vie contre la leur… alors, je pense que le pardon s’impose, tu n’y es pour rien. »

Je marquais une pause pour rire et surtout reprendre un peu mon souffle, réfléchir à mes paroles pour ne pas le froisser et pour être certain qu’il comprenne bien le fond de ma pensée.

« Je désapprouve… quand on use de ses poings au lieu de parler… comme tu l’as fait avec moi, je connais des anges… comme moi, et même des démons, qui ne tuent pas. Je ne te dirais pas pour quoi ils sont comme ça, car moi aussi je me méfie de toi mais… ça n’a rien à voir avec ta condition, c’est plutôt que je n’ai pas envie de mourir pour mes mots haha ! »

Me mordant la lèvre, je me grattais la nuque, tentant vainement de me calmer. Je le regarde dans les yeux, afin qu’il puisse voir que j’étais sincère et poursuivit, espérant ne pas l’effrayer.

« Aion, un croisé… un être puissant et redouté. Tu n’es pas une abomination à mes yeux. Tu es ce que tu es et qu’importe pour moi, tu as un cœur, comme moi. Et je te remercie de ne pas m’avoir tué, encore une fois, cela prouve que malgré ce que tu laisses émaner de toi, tu possède un cœur. »

Tourner autour du pot n’était pas vraiment mon crédo mais, mieux valait que j’explique bien, car je n’avais pas envie qu’il s’enflamme. Evidemment j’avais peur qu’il ne revienne sur sa décision, mais je doutais qu’il le fasse, en revanche, pour ce que je sais de lui, Ji Hoon est assez instable et je voulais lui apporter une certaine sécurité. Je savais à quel point souffler lui ferait du bien, porter le poids du monde seul n’est pas chose facile surtout lorsque tout le monde s’y oppose, je ne sais que trop bien ce que l’on ressent.

« Si je veux t’aider c’est simplement parce que tu ne mérites pas le sort que tu subis et pour moi, malgré ce que pense les autres, c’est injuste. Je ne suis pas ce que l’on me dicte, je suis ce que mon cœur me dicte. »

Un sourire et un éclat de rire avant que je ne me relève, me frottant le ventre à l’aide de ma main, puis je lui tendis l’autre main d’ailleurs, me mordant la lèvre pour essayer d’avoir un peu de crédibilité tout de même. Ce n’était pas facile de lui dire tout ça, ça ne devait pas être facile d’accepter mes paroles bien que je les avais dit avec le plus d’honnêteté et le plus de douceur dont j’étais capable.

« S’il te plait, ne rejette pas ceux qui te tendent la main, je ne suis à la botte de personne, quelques fois je dois suivre les ordres, mais bien souvent… je fais semblant. Chasser ne fait pas parti de mon vocabulaire. Protéger… oui. Faisons un marché ? »

L’enjeu était terrible, mais pour rien au monde je ne laisserais cet aion seul. Il était bien trop instable pour être seul, je sais que je ne pourrais jamais lui faire entendre raison, mais… peut-être qu’il se rendra compte avec moi que parfois il pouvait lever le pied ? Et que la vie valait la peine d’être vécu, aussi triste pouvait-elle se montrer.

« Si tu venais à être blessé par ma faute, je te laisserais me rendre la pareille, je pense que ça ne suffira pas à te prouver ma bonne foi, mais… au moins tu sauras que je suis un ange de parole haha ! »

J’avais conscience que c’était très risqué, mais jamais je ne faillirais à ma parole, je la lui avais donné et je ne voyais aucune raison pour la trahir, car se serait me trahir moi-même et toute mes valeurs. Alors Ji Hoon ? Qu’en penses-tu ? Je suis fiable à ton avis ? J’ai hâte de te voir évoluer et j’espère que toi aussi tu connaitras le bonheur et les petits plaisirs que la vie peut t’offrir si tu sais saisir la chance que tu as.

J'avais une telle mauvaise estime de moi-même que je me demandais comment je faisais pour vivre encore avec ça. Après tout, les anges et les démons n'avaient pas totalement tort au niveau du cas des Aïons, du mien. Si les unions entre créatures surnaturelles entre elles ou avec des humains étaient aussi interdites que ce que j'avais compris, c'était qu'il devait bien y avoir une raison. Mais ce n'était pas pour autant que je devais me montrer compréhensif envers eux. Ils ont fait de ma vie un enfer, ils assument et ils subissent. C'est tout.

Mais j'étais curieux de savoir ce qu'il semblait vouloir oublier. C'est vrai que je ne savais pas grand-chose d'un ange, de la façon dont il nait et tout... Après tout, ce n'était pas comme si je voulais vraiment m'intéresser à tout ça, mais lui semblait avoir vécu certaines choses qui me mettaient curieux. J'ouvris la bouche un instant, dans le but de lui demander quelles choses voulait-il effacer de sa mémoire, mais je la refermai au bout de quelques secondes, me faisant la réflexion que si je demandais ce genre de choses, il allait falloir que je raconte aussi cette partie de ma vie, et je dois avouer que je n'en avais aucune envie. A ce jour, il n'y avait qu'une seule personne qui était plus ou moins au courant de tout ça, jamais, dans les vingt-deux années que j'avais vécu, je n'avais étalé tous mes sentiments, ma détresse, mes envies à quelqu'un d'autre que Tomoya. Ce n'était pas pour rien que j'avais besoin de lui. Ne serait-ce que pour vivre quelques petites secondes de plus, même si je n'accordais pratiquement aucune importance à ma propre vie.

C'était étrange, tout cette ambiance entre moi, un aïon, et lui, un ange. On ne pouvait pas dire qu'elle était au beau fixe. Non, il restait quand même un peu de tension entre nous deux, mais jamais je n'aurais cru possible d'avoir ce genre de conversations avec un ange. A croire qu'il avait une mauvaise influence sur moi. Puis je me retrouvais être beaucoup plus sensible à ses paroles que je n'aurais pu le croire. Tandis qu'il parlait, étalant le fait que ce que les anges et démons me faisaient vivre était totalement injuste, des tas de souvenirs me revinrent en mémoire. Le premier ange que j'avais tué. Ma mère, que j'avais également tué. Les nombreuses blessures et tortures que j'avais subies. Les humains qui m'avaient accueilli, auxquels je ne m'étais pas vraiment attaché parce que je savais comment ils allaient finir leur vie. Il planta alors son regard dans le mien, que j'eus du mal à soutenir pour une fois, restant toujours silencieux, sans dire un seul mot ni bouger d'un pouce.

Selon lui, j'avais un coeur. Selon lui, j'étais une personne comme une autre. J'eus un sourire amer en l'entendant.

« Désolé, mais le nombre d'anges et de démons que j'ai tué ne prouve pas vraiment que j'ai un coeur, comme tu sembles le croire... Après tout, si je meurs, les enfers m'attendent et pourtant je vis déjà un enfer sur terre, alors... »

Je restais persuadé que ma vie n'avait aucune importance. Après tout, c'était vrai. Le grand brasier de l'enfer n'attendait que moi depuis vingt-deux ans. Enfer qui était déjà sur Terre en ce qui me concernait. Ma vie avait toujours été chaotique, et pourtant je continuais à vivre. Etonnant, n'est-ce pas ? Je fixai alors sa main tendue. Si je m'y attendais. Ca n'était pas possible, un ange qui me tendait la main pour améliorer et allonger ma vie.

« Et les tiens ? Ils en penseront quoi ? Un ange qui accepte de protéger un aïon... ça doit être une première et ça m'étonnerait que ton Dieu laisse passer ça... »

Je n'avais pu m'empêcher d'éviter de cacher l'amertume et la haine dans ma voix. Un Dieu... bien sûr qu'il existait, sinon il n'y aurait pas d'anges ni de démons et moi-même je n'existerais pas. Mais ce Dieu en question n'avait jamais voulu m'aider pour quoi que ce soit, alors je me fichais bien de ce qu'il pourrait penser, mais c'était plus pour Chul Hei que je disais ça. Je ne pense pas que je culpabiliserai pour faire de lui un ange déchu mais lui n'en serait sûrement pas heureux.

« Tomoya ne... »

Je me stoppai, ne voulant pas impliquer Tomoya dans cette histoire. Mais en le regardant, je sentis ma dernière barrière se briser. J'avais Tomoya, ça devrait me suffire, même si j'avais plus tendance à le mettre en danger, mais je m'accrochais à lui comme je m'accrochais à la vie. J'avais un besoin maladif de l'avoir à mes côtés, sous peine de mourir sur le champ, que ce soit tué par un ange ou un démon ou tué par moi-même. Mais avoir quelqu'un d'autre... c'était un concept pratiquement inconnu pour moi. Mais je pouvais aussi dire non. Si je me jetais sans aucune hésitation en plein milieu du no man's land que formaient les démons et les anges, ça n'était pas pour rien. J'avais besoin de les combattre, sinon ma vie ne rimait pas à grand-chose.

Je soupirai et baissai la tête en me passant la main sur le visage. Cet ange était vraiment trop différent. En plus de ça, je ne savais toujours pas si je devais lui faire confiance ou non, même si je penchais toujours plus ou moins pour la deuxième option.

« Je... Je ne sais pas, j'ai besoin de... de me jeter en plein milieu d'un combat comme ça, sans pratiquement aucune chance de survivre... C'est ma façon de vivre. Si je te disais oui, je ne saurais même pas ce que je devrais faire ensuite, mais si je refuse, je n'aurais qu'à continuer a vie, comme d'habitude. »

Je l'avais toujours pensé : si je vis, tant mieux, si je meurs, tant pis. C'était simple. L'image de ma mère, les traits déformés par la haine infinie qu'elle me vouait auparavant, me revinrent en mémoire tandis que je poussais un gros soupir pour refouler des larmes de détresse que me vinrent aux yeux. Cet ange, il avait réussi à percer ma barrière, le mur derrière lequel je me cachais, en l'espace de quelques minutes.

« Et... qui te dit que je ne vais pas me retourner contre toi à un moment donné ? »

Quelque part, j'avais l'impression que j'essayais de me convaincre moi-même. Je ne pouvais pas baisser les bras et me laisser guider par un ange.

J’avais du mal à dialoguer, comme je l’avais pensé, lui faire entendre raison n’était pas au menu et de toute évidence impossible, du moins pas pour l’instant, j’espère qu’un jour cela sera possible ce serait dommage qu’il se gâche pour si peu. Mais je comprenais ce qu’il voulait et ça, il n’était pas près de le céder. Il voulait tout simplement sa liberté. Je lui avais parlé de cœur et pourtant, c’était comme s’il n’avait pas écouté ce que je lui avais dit, était-il persuadé d’être un monstre et de mériter son sort ? Dans ce cas pourquoi s’acharner à vivre, il aurait très ben pu se jeter au beau milieu du repère des démons ou des anges…

« C’est faux. Du moins, pour moi. Tu défends ta vie, il me semble que la légitime défense est un droit ? Et… pour ceux qui seraient innocents… je n’approuve pas, évidemment, mais est-ce que si je te demande d’arrêter tu m’écouteras ? Tout le monde fais des erreurs… le tout, c’est de savoir que l’on les faits pour pouvoir se corriger. »

Je lui proposais un marché et… il n’y répondit pas pour l’instant, mais j’allais insister, Ji Hoon était particulier, bien trop intéressant pour qu’on passe à côté sans rien dire, pour qu’on ne le remarque pas. Il était un écorché vif et pourtant j’étais certain que sous ses airs de mauvais garçon il y avait un homme qui se cherchait et qu’une fois que cet homme se trouverait, cela promettait d’être fantastique. Je fus surpris qu’il me parle de Dieu ainsi et surtout qu’il pense toujours que je sois à sa botte, je me mordis la lèvre et rit de nouveau avant de me calmer pour reprendre la parole et lui répondre.

« Ils n’ont pas vraiment besoin d’être au courant et comme je te l’ai dis, Haha, je ne sers personnes si ce n’est par obligation parfois… et, je ne tue pas ni ne dénonce, ce n’est pas dans mes principes. »

Je ris de nouveau essayant de me calmer, c’était agaçant à la fin, mais rien n’y faisait, déjà très peu expressif, tout comme moi, l’aion riait et ça devait d’autant plus le mettre en pétard. Chose qui me fit sourire malgré moi, car tout comme moi, il ne pouvait que rire et rien d’autre. Il faudrait sérieusement que je demande à cette petite vendeuse ce qu’elle met dans ses bonbons ! Enfin, cela dit, il prononce quelque chose. Un prénom et je penche la tête sur le côté, m’intriguant. Je voulais savoir, mais il ne devait pas me faire confiance et pour cette raison je me taisais, nous verrons plus tard s’il se confie à moi un jour !

Ma proposition, mes paroles semblaient le déstabiliser et je pouvais le comprendre, quelqu’un qui essaye de s’intéresser à lui pour ce qu’il est, pour sa personne et non pas, ni ses capacités, ni le déranger encore plus, non… il devait vraiment penser que ce genre de personne n’existait pas et j’étais triste d’imaginer que toute sa vie, il n’a connu aucun ange ni démon comme moi. C’était tellement triste que je soupirais. J’aurais bien posé ma main sur son épaule, mais… je doute qu’il apprécie franchement. Je me contentais donc de me lever et de lui sourire, toujours en me grattant la nuque.

« Je ne te demande rien… si ce n’est, d’accepter de communiquer avec moi ? Je te l’ai déjà dis, je voudrais juste t’aider… cela signifie… parler plutôt que de frapper ? Enfin, je ne suis pas un psy ne t’inquiète pas mais… si on ne te cherche pas est-ce que ce n’est pas mieux ? Evincer ceux qui te veulent du mal et vivre une vie plus ou moins normal en dehors de ça ? »

Il semblait mal en point et je ne voulais absolument pas qu’il se sente mal… les gens ont pour habitude de penser que pleurer est un signe de faiblesse, pour moi non. C’est un signe de force… et je regardais ailleurs, dans le doute pour ne pas le déranger, faisant croire que je n’ai rien vu. Je le regardais de nouveau lorsqu’il reprit la parole, me mordant la lèvre en souriant et riant un peu d’ailleurs. Ça c’était atténué, j’étais contente.

« Rien ne me garanti que tu ne me dénonceras pas… pourtant je ne vois pas ce que ça t’apporterait et cela prouvera que j’aurais été, une fois de plus un peu trop naïf. Que l’on face se marché m’apporte simplement la satisfaction de pouvoir t’aider, si tu as peur que je te trahisse, avec ce marché tu sauras que tu pourras te venger et je n’ai qu’une seule parole, sans doute le fait que je sois un ange… je ne supporterais pas d’être à l’encontre d’un de mes principes. »

En passant ma main dans mes cheveux, je réalisais que… je voulais aider trop de personne. Au fond, n’était-ce pas ça être un ange ? Vouloir aider son prochain quoi qu’il arrive et sans aucune raison ? Je voulais rendre service sans rien attendre en retour, du moins ici, qu’il ne me tue pas en contre parti, c’était déjà bien. En si peu de temps, rencontrer un être si spécial… voila que je me mettais à remettre en question ce que le monde a fait et ce qu’anges et démons étaient. Je ne connaissais pas beaucoup d’aion et malgré les massacres auxquels ils ont assistés, ils respirent la joie de vivre contrairement à Ji Hoon qui semble avoir le cœur lourd, souffrant de blessures diverses et variées qui l’oblige à l’envelopper de papier bulle, de glace et je dirais, à vu de nez, de fil barbelé.

« Je ne pense pas qu’on ait beaucoup d’écart toi et moi et je n’ai pas vécu le car de ce que tu as du vivre, mais si je pouvais t’aider à porter ton fardeau, est-ce que tu n’irais pas mieux ? C’est… tout ce que je souhaite. Et si tu as déjà un ami sur lequel compter alors tu sais déjà à quel point c’est agréable de ne pas se sentir seul au monde. Imagine donc… ce que c’est quand on est entouré de plusieurs personnes comme ça ! »

Je lui souris, tout simplement gardant ma main tendue, le cœur battant de savoir s’il allait saisir cette chance ou non. Je n’insisterais pas, mais je lui rendrais visite de temps en temps, c’était certain, car son visage meurtri, ses yeux vides et angoissés, sa peur, sa souffrance, je ne les oublierais jamais.

Je ne comprenais pas les anges. Pourquoi est-ce qu'ils s'entêtaient à essayer de trouver du bien en chaque personne qui existe au monde, même chez les démons et les pires humains que la Terre ait portés ? Même chez moi ? Je n'étais pas quelqu'un de bien, ni quelqu'un de mal, alors il était inutile de chercher. Je ne savais pas si c'était à cause de leur grâce divine qui leur montait à la tête, mais il y avait de quoi se poser des questions. Enfin, c'était plus ça pour le cas de Chul Hei en particulier, tous ses copains à plumes n'étaient pas comme ça, je l'avais bien appris à force. En fait la plupart des anges tenaient plus de l'humain ou voire carrément du démon et ils prétendaient répandre le bien et le bonheur partout où ils allaient... Mon oeil, oui. Mais vraiment, l'ange en face de moi avait vraiment quelque chose de différent, j'avais presque l'impression qu'il arrivait à m'influencer sans aucun problème, mais pour avoir réussi à me cerner en quelques minutes, même si ça m'énervait grandement, ça n'était pas trop étonnant. Mais justement, cela ne justifiait pas du tout le fait qu'il était digne de confiance ou non, question que je me posais toujours.

En fait, paradoxalement, cet ange m'énervait et me calmait un peu. Je crois que je le hais, à vrai dire. Et on pouvait ajouter nos petits rires fréquents à mon agacement.

« Tu sais, garantir que je ne m'en prendrais qu'à ceux qui veulent attenter à mes jours, je ne pense pas que je puisse le faire. Je n'ai aucun but dans la vie, je me fiche bien de vivre ou mourir, alors c'est bien l'une des deux seules choses qui m'empêchent de partir tout de suite de ce monde. »

Ca n'était pas faux, mais je n'avais tout simplement pas dit que la deuxième de ces deux choses, c'était Tomoya lui-même. Il avait déjà fait beaucoup pour moi, même s'il ne le savait pas forcément. Mais pour une fois, je ne voulais pas le mêler à cette histoire, même si d'habitude j'essayais de l'entraîner dans mes délires. Parce que oui, il fallait avouer que j'avais un brin de folie plutôt prononcé par rapport à la norme humaine. En plus, il semblait avoir remarqué que je pensais à quelqu'un pendant que je réfléchissais à sa proposition, alors c'était plutôt mauvais comme situation. Enfin, le prénom Tomoya n'était pas très rare donc ça n'était pas un problème non plus.

Je restais silencieux, réfléchissant à tout ça. Non, vraiment, je ne pouvais me résoudre à accepter l'aide d'un ange, d'un "ennemi" (qui n'avait pas l'air d'en être vraiment un vu tout ce qu'il m'avait dit et fait depuis le début de notre rencontre). Mais... Je ne savais pas trop quoi penser en fait.

Je me demandais vaguement si Chul Hei était comme ça avec absolument tout le monde, ou si ce n'était que pour mon cas. Je ne pouvais pas vraiment avoir attiré les yeux d'une créature emplumée comme ça, à moi tout seul, donc je penchais plutôt pour la première option, ce qui ne m'étonnait pas vraiment. Un peu naïf sur les bords, lui, comme il le disait... Vraiment, on rencontrait des gens vraiment étranges, qu'ils soient humains ou non. Enfin, malgré ses rires qui revenaient souvent au milieu de mes pensées, semblables malheureusement aux miens que j'avais toujours un peu de mal à retenir, il ne semblait pas être une personne très expressive... Pas du genre froid, mais du genre calme. Trop calme. Tout mon contraire, moi qui ne pouvait jamais tenir en place.

« Non, je ne pense pas que même si tu dois être beaucoup plus vieux que moi en tant qu'ange, tu n'aies vécu ce que moi j'ai vécu, même si je ne doute pas que tu as du avoir tes propres souffrances. »

Ma voix fut sèche, comme si j'étais irrité, ce qui était le cas. Je ne supportais pas à ce qu'on me prenne en pitié et je n'avais pas tendance à me considérer comme une victime, alors faire allusion à ce que j'avais vécu alors que lui-même n'en savait rien avait eu l'effet de m'agacer. Néanmoins, je pris un air désolé mais en détournant le regard sur le côté. Mais je pensais à ce qu'il m'avait dit après. Je me le suis déjà dit des centaines de fois, Tomoya me suffisait.

« J'ai déjà quelqu'un sur qui compter. »

J'eus envie de rajouter que si la personne en question me laissait un jour, je ne pourrais pas le supporter, même cela ne ferrait que faire insister l'ange pour que j'accepte enfin sa proposition. Surtout qu'il n'avait pas à savoir ma vie de fond en comble, non ? Je n'avais aucune obligation envers lui. Enfin, maintenant, mes idées s'embrouillaient dans ma tête, je n'avais aucune idée de quoi penser, de ce qui était juste ou non, il avait réussi à me faire perdre tous mes repères en l'espace d'une soirée. Juste avec ce temps, il avait réussi à me découvrir et à chambouler tout mon monde et ma vision des choses que je voulais pourtant garder intacte.

Je poussais finalement un soupir, la tête baissée. Finalement, je relevai les yeux, sans pour autant regarder Chul Hei dans les siens, fixant un point invisible à côté de son visage. Ce n'était plus mes yeux habituels, soit plein de rage, soit d'une espèce de fausse joie de vivre ou quelqu'un chose d'autres. Non, des yeux totalement perdus, qui trahissait ma peur d'un monde que finalement je ne connaissais pas, du monde, de tout, mon envie de vengeance mais surtout mon instabilité que je maudissais tous les jours.

« Je... Je crois que j'ai besoin d'une autre personne que lui... »

"Lui", c'était Tomoya. Il n'était pas censé le savoir mais il pouvait plus ou moins deviner. Et c'était une sorte de façon de dire oui à sa proposition, mais pas complètement. La confiance n'était pas là, mais presque. Je ne disais pas non, je ne disais pas oui, mais presque. J'étais perdu.

Comme je m’en étais douté, il m’avait averti, non, il n’arrêterait pas et même si ça me peinait, je l’avais su depuis le début de notre conversation. Une chance que j’ai échappée à cette règle ! Je me mordis la lèvre, souriant, embarrassé…

« Et ceux qui ne t’attaque pas… est-ce que tu seras capable de passer à côté ? »

Je pensais en réalité à Kanon, à Andreas, à Len, à pas mal de monde qu’il pourrait attaquer sans raison aucune et qui ferait de lui mon ennemi. Je n’avais pas envie que cela se produise et je voulais l’en avertir, je serais déchiré entre le soutien de mes amis et le soutenir lui. Perdre les deux me serait fatal. Soupirant, je passais ma langue sur mes lèvres en fixant un point sur le sol derrière Ji Hoon, réfléchissant à ce que je pouvais bien lui demander. Je ne voulais pas qu’un mauvais choix de mots me fasse défaut.

« Je n’aimerais pas savoir qu’un de mes amis a été tué… je sais qu’ils sont inoffensifs si on ne les cherche pas, ça ne te coûte rien d’essayer hm ? »

Insistant sur notre marché qui pourrait lui permettre d’être un peu mieux dans sa peau, j’avais frôlé la zone sensible puisqu’il avait répondu sèchement que non, je ne connaissais pas la même douleur, néanmoins faire part de mes souffrances c’est qu’il ne les négligeait pas et j’en étais ravi, car cela prouvait qu’il n’était pas égocentrique au point de penser qu’il était seul à souffrir de la sorte. C’était déjà un plus et plus j’en apprenais sur lui, mieux je me portais car je pouvais plus facilement communiquer avec lui. Il avait du le sentir et je ne sais pas s’il apprécie… j’en doute ! Il prit un temps pour pouvoir poursuivre sa réponse et me dire qu’il avait déjà quelqu’un sur qui compter, j’avais cru comprendre ça un peu plus tôt à l’entente d’un prénom, mais ne ferais pas l’effort de chercher qui était ce Tomoya, pour ne pas trop m’immiscer dans la vie de Ji Hoon.

« Excuse moi, je ne voulais en rien te blesser, j’aurais voulu être là pour t’aider plus tôt ! »

Soupirant et riant doucement encore une fois à cause des effets des bonbons et me mordit la lèvre, m’excusant d’un geste de la tête. Je me grattais la nuque, ne sachant pas trop quoi faire j’avais essayé, ce n’était pas de ma faute s’il état têtu. Et quand j’étais près à baisser les bras pour ce marché, il me dit qu’il avait peut-être besoin de quelqu’un d’autre et mon sourire fut si grand que j’aurais surement vite fait de l’effrayer. Je l’aurais pris dans mes bras pour lui taper doucement le dos s’il n’était pas si méfiant, je me retenais de justesse !

« Ah ! Je suis vraiment content que tu me donnes cette chance ! Je ne t’enquiquinerais pas, c’est promis ! »

Je devais avoir l’air idiot à sourire comme ça et à paraître si excité, mais je ne pouvais pas m’en empêcher. Même si je n’avais pas gagné sa confiance, chose que je comprenais parfaitement, j’étais au moins l’un des anges les plus chanceux sur terre ! Car, pas encore mort tué par cet aion et par la même occasion ayant une chance de l’aider ! Je voyais à quel point il était perdu et tentais de me calmer pour pouvoir reprendre la parole.

« Ecoute, je sais que tu ne me fais pas confiance alors… si tu veux c’est toi qui m’appellera en numéro masqué et, tu me diras quand est-ce que tu veux qu’on se voit… ça te parait plus sur ? »

Il fallait que je lui note mon numéro quelque part et ne connaissant pas les lieux, mieux valait que je le laisse faire. Une fois que ce fut fait, toujours le sourire aux lèvres je le regardais dans les yeux, espérant ne pas le gêner davantage.

« Je me doute que ça ne doit pas être facile à accepter… mais, sache que je suis content que tu veuilles bien de moi dans ta liste blanche et qu’une fois qu’on m’a comme ami, même si ça n’est pas le cas pour l’instant, tu comprendras très vite que je suis vraiment sincère, merci ! »

Je le remerciais de me laisser l’aider, c’était idiot, je sais, j’en suis conscient mais j’étais comme ça, pour moi c’était déjà un très bel effort de sa part et puisqu’il les fournissait pour moi, je devais m’en montrer reconnaissant !

« Dis… maintenant qu’on a mis les choses au clair… on devrait peut-être se détendre un peu ? Je t’aide à faire ton service ? »

Je lui montrais ma guitare ainsi que son tablier, je doute qu’il sache en jouer mais, sait-on jamais ? Et puis, il ne s’agissait pas vraiment d’un échange, je pouvais chanter aux tables pendant qu’il servait pour rendre les gens moins impatients sur leurs commandes ou bien tout simplement l’aider à servir bénévolement, sans aucune paye. Juste… pourquoi pas, dire à son patron qu’il m’avait convaincu et que les plus de ce soir lui reviendrait donc de droit ? Rien que l’idée me faisait sourire et finalement lorsque nous sommes rentrés, je n’avais pas contrôlé ma main qui avait gentiment tapoté son dos, me mordant la lèvre en faisant comme si de rien été, mal à l’aise sans le montrer.

« Vraiment… je suis content ! Rien ne pourra me mettre de mauvais poil ce soir, merci Ji Hoon ! »

Le pauvre devait trouver ça étrange, pourtant ce n’était que moi et il apprendra bien vite que j’étais comme ça, point ! Je sentais déjà mon esprit se faire des films sur une amitié naissante, son sourire, je ne l’oublierais pas, car un jour… je sais qu’il sourira sans qu’il y ait besoin de bonbons ! Et ce jour là, j’espère fortement que je serais là !

Tandis que je réfléchissais, je me demandais si les bonbons qu'il avait partagé pour nous deux n'avaient pas des effets plus ou moins rallongés suivant si la personne est totalement humaine ou non, vu que lui, étant un ange, avait l'air de vouloir éclater de rire dans les secondes qui arrivaient, alors que moi, cela faisait bien deux minutes que je m'étais un peu calmé. Ou alors c'était parce que lui respirait un peu la joie de vivre sur Terre alors que moi je m'en fichais royalement. En tous cas, il était sûr que j'allais me méfier même de la nourriture comme de la peste maintenant, on peut plus avoir confiance en quelque chose de non-vivant maintenant ! Enfin... Comme je le disais, lui garantir que je n'attaquerais dorénavant pas n'importe qui sous le coup d'une simple impulsion, je ne pouvais pas et je ne le voulais surtout pas. Sinon, il y a longtemps que je serais passé de l'autre côté. C'était un moyen de défense comme un autre, je ne pouvais pas prévoir si quelqu'un allait se retourner contre moi à un moment donné. Faire confiance à n'importe qui était un concept inconnu pour moi et plutôt idiot quand on y réfléchissait. Le monde était cruel, tu tuais ou tu te faisais tuer, c'était à choisir, et la première option était pour moi la meilleure. Sorte de vengeance. Personnellement, je voyais plutôt ça comme de la justice. S'ils n'acceptaient pas les aïons, ils en payaient le prix, non ?

J'eus une pensée pour ma mère. Qu'est-ce qu'elle en penserait, de ce que j'étais devenu ? Je pense qu'elle s'en ficherait, mais j'aurais bien aimé savoir si elle me détestait vraiment ou si ce n'était qu'une manifestation de sa haine, de sa colère et de sa frustration pur avoir été bannie des Enfers. Enfin, que je sois mort ou vivant, je ne pense pas que cela aurait fait une différence pour elle, malheureusement. Néanmoins, je m'interrogeais toujours sur ce qu'avait vécu l'ange en face de moi. Après tout, un ange n'oubliait-il pas sa vie d'avant ? Comme un démon ? Je n'étais pas trop informé sur ce côté-là de leurs races, même si je dois avouer que ça n'était pas ma priorité.

Le reste se passa très vite. L'image de l'immense sourire de Chul Hei me vint, me faisant ouvrir grand les yeux. Là, je ressentis alors une sensation étrange, la même que quand j'avais rencontré Tomoya. Du... soulagement ? Je n'étais pas sûr, mais pour moi, c'était tout nouveau, la deuxième fois que je ressentais ça. La première fois, je n'avais même pas réussi à identifier ce que c'était vraiment. L'envie de serrer Chul Hei dans mes bras rien qu'un instant, juste pour m'assurer que ce n'était pas une illusion, qu'il y avait vraiment une deuxième personne au monde à se soucier de moi, me vint soudain, mais je me retenais. Non, Ji Hoon, tu n'avais pas besoin de ça. J'essayais tant bien que mal de cacher toutes les émotions qui me maîtrisaient à présent, que je n'avais pas l'habitude de ressentir et que j'avais du mal à contrôler, et je baissais les yeux un moment pour cacher ça.

Je déglutis, lui répondant par un simple sourire en coin, mais en vérité, j'étais gêné qu'on m'accorde autant d'attention. Ce n'était pas habituel pour moi. Mais par contre, qu'il me montre qu'il avait pitié de moi, je ne voulais pas ça, j'avais toujours vécu sans compassion tout le long de ma vie ou presque, je pouvais bien continuer pour le reste des jours qu'il me restait à vivre. Finalement, avec difficulté, je finissais par prononcer quelques mots pour répondre à sa reconnaissance qui m'étonnait au fur et à mesure que le temps passait.

« De rien... Si ça peut te faire plaisir... »

Je haussais les épaules, l'air de rien. Quelque part, j'avais aussi envie de lui dire merci, mais là, pas trop à la fois. Déjà qu'il avait réussi à briser mon image habituelle d'aïon insensible à pas mal de choses, je ne préférais pas trop lui montrer tout ce que je ressentais. Son numéro de téléphone en poche, nous rentrions à l'intérieur du restaurant par les cuisines, ma pause se finissant déjà dans quelques minutes à peine. Je me stoppais lorsque je sentis sa main tapoter légèrement mon dos, le regard un peu perdu dans le vague. Je secouais légèrement la tête, me disant qu'il était vraiment tout le contraire de moi. Tactile, sociable... Ca, c'était pas trop moi en fait.

Comme il l'avait suggéré, je me dirigeais vers mon patron qui surveillait un peu comment ça se passait dans les cuisines, lui exposant l'idée que Chul Hei voulait bien m'aider pour ce qui était de mon service de ce soir, ce qui ne me dérangeait pas tant que ça et qui ne dérangeait pas le chef non plus. Je me retournais vers l'ange en question avec un léger sourire pour lui faire comprendre que tout était bon pour ça, même si on était encore très loin de l'éclat de rire que j'avais eu quelques minutes plus tôt.

D'ailleurs, je devais avouer que Chul Hei se débrouillait plutôt pas mal pour se fondre dans la masse humaine. Des yeux d'un simple humain, je suis sûr qu'il n'avait rien de suspect. J'enviais un peu ces humains en question, qui vivaient dans l'insouciance, qui ne savaient rien de l'apocalypse qui se préparait. Parce que cette fin du monde, j'étais plus ou moins au courant avec tous les anges et démons que j'avais croisé, mais je ne connaissais pas un seul détail. Je lançais un regard à Chul Hei, me demandant si lui le savait, mais je ne savais pas si c'était une bonne idée de lui en parler. Par contre... C'était moi ou ce gars ailé savait comment s'y prendre avec les gens ? Parce que figurez-vous que moi, je n'avais vraiment pas le droit à des sourires aussi immenses de la part des clients, juste de simples sourires de politesse. Tss. Je lui lançais un regard à la fois exaspéré et à la fois blasé ("Toi, un jour, je te cramerais...") , alors qu'en vérité, j'étais un peu amusé de la situation, même si le fait que lui semblait être vraiment apprécié des humains ne me plaisait pas tant que ça. En fait, je hais cet ange. Enfin bon, passons.

Non, je n'étais pas jaloux enfin !

A un moment où aucune demande des clients ne faisait son apparition, je partis m'adosser contre un mur dans un coin du restaurant, à côté de Chul Hei, l'air pensif, même si l'image de cet abruti d'ange se marrant bien avec les clients me restait toujours dans l'esprit. Niarf.

« Hey... parle-moi de toi. De ta vie, de ce que t'as fait sur Terre, de ce que t'as vécu... »

Même si c'était méchant, j'étais quelqu'un qui faisait exprès de manquer de tact en tant normal, si bien que maintenant, je manquais vraiment de tact sans le vouloir du tout. Parce que je sentais bien qu'évoquer un peu ce que lui avait vécu n'était pas la meilleure chose à faire. Je rougis légèrement, un peu gêné de lui avoir rappelé des choses désagréables... enfin pas tant que ça. Non mais j'allais pas changer niveau caractère en l'espace de quelque minutes, il ne fallait pas rêver tout de même. Quoique.

« Enfin... je t'oblige à rien, je comprendrais si tu ne veux pas raconter ça au premier venu. »

Ji Hoon n’avait pas ouvert la bouche une seule fois malgré les réponses que je lui donnais et mes prises de paroles, mais je pouvais le comprendre ça ne devait pas être facile de chambouler ses habitudes et puis, il avait raison de ne pas le faire pour moi, surtout que j’avais tendance à parler beaucoup plus lorsque j’étais à l’aise et un peu plus confiant en ce que j’entreprenais. Ici, c’était le cas, j’étais content de me faire un ami qui plus est un aion, ce qui signifie un être qui a souffert et qui m’accorde son pardon pour les fautes commises par mes frères et demande un effort incomparable que j’admirais au plus au point !

Le fait que je lui souris autant le perturbait d’après ce que je voyais et j’en étais d’autant plus souriant, sincère et toujours à l’écoute et à l’affut du moindre geste, de la moindre expression qui pouvait me donner plus d’indications à son sujet, sur son comportement, sur ce qu’il pourrait penser, quelque chose… je comprenais alors combien cela devait être difficile d’être à la place de l’autre, car j’étais un peu comme ça avec certaines personnes pour les préserver de moi. Même si je n’étais pas dangereux, je pouvais nuire aux êtres qui m’étaient cher en raison de mon statut d’ange.

Je lui proposais mon aide et c’est avec un petit sourire qu’il me montra que c’était bon. D’ailleurs, j’avais remarqué son demi-sourire lorsque je lui avais avoué vouloir l’aider puis, tout simplement être content, est-ce que j’avais réussi à le toucher ? Surement, en tous les cas mieux valait ne pas l’embêter avec ça, même si j’en mourrais d’envie !

Il n’y avait pas beaucoup de clients, mais… j’étais content et mon sourire en disait si long sur ma bonne humeur qu’elle déteignait sur les gens, chose qui avait l’air d’intriguer l’Aion qui me regarder d’une étrange façon ! J’aurais presque cru qu’il était jaloux et me mordit la lèvre essayant de ne pas être trop proche des clients. Si je venais à lui voler son boulot, ce serait le comble ! Et puis… je venais grâce à lui alors c’était hors de question, de toute façon je doute que le patron veuille se dispenser de Ji Hoon vu comme il attire des clientes ~ j’avais ce dont moi aussi, à croire que ce devait être propre à toutes les créatures un tant soit peu surnaturelles ?

Cela étant, le ciel s’endormait peu à peu devenant noir et les clients se faisaient un peu plus rare ce qui nous permis d’attendre après avoir nettoyés quelques tables que les derniers clients finissent pour pouvoir terminer, peut-être la soirée. Nous étions assis presque à côté et sans même me regarder il me demanda ce que j’avais vécu avant d’être là aujourd’hui. Il était rouge quand je l’ai regardé, très légèrement mais c’était suffisant pour que je comprenne qu’il ne voulait pas me blesser, d’ailleurs la reprise de ses paroles me le prouva. J’hésitais un moment, me mordant la lèvre en penchant la tête, regardant le plafond distraitement puis finalement me mis à parler en baissant progressivement les yeux.

« Ah… ça ne me dérange pas. J’ai juste… honte de ce que j’ai fait. Avant d’être comme ça, j’avais une femme… et un enfant. Et tout homme se devait d’aller défendre son pays… alors j’ai du les laisser pour partir en guerre. La dernière année… l’avant dernier jour… j’ai été tué… et la seule chose que je regrette c’est de ne pas avoir pu profiter de ma femme et de ma fille en tant qu’homme »

Une pause, le temps de reprendre mon souffle et de ne pas laisser ma voix se saccader. Je n’étais pas gêné ni angoissé d’en parler et les émotions qui me traversaient n’étaient pourtant pas si forte pour m’arracher quelques spasmes, mais, disons simplement que le regret me faisait perdre mes moyens autant que l’enjouement qui s’était emparé de moi de part la question de Ji Hoon. Je n’aurais jamais cru qu’il me demanderait ça ce soir et je ne savais pas si j’avais le droit de lui retourner la question.

« Je garde de bons comme de mauvais souvenir… et même si je vivrais à jamais avec ce regret, il faut… aller de l’avant et je suis toujours là… alors c’est que c’est la bonne voie. »

Je n’avais fait aucune précision vis-à-vis de Dieu, pour la simple et bonne raison qu’il n’y avait pas lieu de parler de lui et que de toute façon, que je sois un ange de Dieu ou pas, il n’était pas là pour surveiller mes moindres faits et gestes et… même s’il pouvait tout savoir, je doute que les choses se fassent au hasard. Si je suis encore là, c’est surement parce qu’on me l’a permis… non, c’est plutôt parce que ce que je fais n’est pas mal.

« Et… est-ce que je peux te retourner la question ? Bien évidemment ne te sens pas obligé »

J’avais toujours ce petit sourire qui devait à la fois l’agacer et lui donner envie de s’ouvrir un peu plus, mais il avait fait énormément d’effort et je respectais cela. Cependant, j’avoue qu’en bon gamin, j’avais révélé quelque chose que je ne disais pas souvent et à des gens de confiance en général et… je serais légèrement triste que l’aion ne m’en dise pas autant sur lui. Même si je comprenais tout à fait qu’il ne veuille pas aujourd’hui.

Finalement deux clients arrivèrent et je m’occupais d’un. Le deuxième, Ji Hoon s’en chargea puis débarrassa. Je profitais alors qu’il ait les mains prises pour m’approcher de lui. Je ne savais pas s’il allait avoir des réflexes digne de Spiderman pour sentir un quelconque danger ou bien s’il allait comprendre que ce n’était pas un danger que je représentais ou encore s’il n’allait pas avoir de réflexe mais comme dit le diction, « qui ne tente rien n’a rien » et pour cette raison, je pris mon courage à deux mains et profita qu’il ne puisse ni m’en coller une, ni me repousser pour pouvoir ouvrir mes bras et l’encercler, souriant en le lâchant quelques secondes plus tard avant de débarrasser comme si de rien n’était la dernière table.

Sur le coup, j’étais fier de ma petite approche, mais… je savais que la vengeance qu’il pourrait m’offrir serait des plus terribles. En tous les cas, anxieux de l’avoir froissé au point de ne plus le revoir, je n’osais lui parler. Pourtant il fallait que je le fasse et ce fut après un temps de réflexion que je décidais de le faire.

« Je suis désolé, j’étais vraiment trop… heureux, ne m’en veux pas, il fallait que je le fasse… ça peut te paraître étrange, je comprendrais d’ailleurs, mais… c’est ma façon de t’accueillir, de t’accepter vraiment dans mon cercle plus ou moins fermé d’amis »

J’en venais à avoir quelques regrets pour mon geste assez… imprévisible sur le coup et très étrange venant de moi, mais que faire de toute façon ? C’était fait et je n’avais plus qu’à espérer que la situation ne se retourne pas contre moi. J’avais pris grand soin, malgré l’acte irréfléchi, de ne le faire devant personne afin de ne pas le gêner davantage, est-ce que j’avais bien fait ? Au moins… ça pourrait m’éviter la mort… enfin… oui, presque ?

Je ne savais que répondre aux énormes sourires de l'ange. Tous les sourires que j'offrais aux gens, en général, n'était déjà pas des sourires qui exprimaient une joie certaine, vu que la plupart était un peu sarcastique, mais en plus il me permettait de me cacher encore un peu plus derrière le mur que je dressais sans remord entre moi et le reste du monde. Mis à part la petite pierre du mur en question que j'avais retirée juste pour y laisser passer Tomoya. Et peut-être que j'en retirerais une deuxième pour Chul Hei. Ou peut-être pas. Qui sait ? Je ne savais toujours pas si je devais lui accorder ma confiance ou non. Après tout, il semblait tout faire pour me montrer que lui se mettait en danger dans le but de préserver ma propre vie. Soit c'était du bluff, pour m'entraîner dans son piège, soit il était vraiment sincère. Inconsciemment, j'espérais que la deuxième option était la bonne. Je ne voulais pas forcément quelqu'un sur qui je pouvais m'accrocher comme je le faisais avec Tomoya, ce dernier remplissant à la perfection ce rôle, mais juste quelqu'un sur qui je pouvais souffler juste quelques secondes. Seulement, Chul Hei se mettait toute la communauté angélique à dos en faisant ça, et maintenant, je devais avouer que s'il devenait déchu par ma faute, je m'en souciais un peu plus. Vraiment, Ji Hoon... s'inquiéter pour un ange, ça ne te ressemble pas... De toute façon, tu ne lui fais pas confiance pour le moment... non ?

Raaaaah, mais vraiment, cet ange était-il obligé d'étendre sa bonne humeur sur toute son aura et celle des humains ?! Je n'avais pas le pouvoir de dire si telle personne était un ange, un démon, un humain ou autre chose, mais je savais reconnaître quand une aura était différente d'une autre ou que d'habitude, puisque j'arrivais à les voir un tout petit peu, et en ce moment, celle de l'ange bougeait dans tous les sens. Limite, ça plus les effets étranges des bonbons de tout-à-l'heure, il se mettait à sautiller partout... Quoique, c'était déjà vraiment presque le cas. Je ne comprenais pas. Protéger un aïon lui faisait tant plaisir que ça ou quoi ? Surtout un aïon en plus. Que ce soit sous terre ou au ciel, on essayait de se débarrasser de notre race, donc... rectification, ce n'était pas l'entière communauté angélique qu'il se mettait à dos, mais bien le monde entier, et ça ne se limitait pas qu'à la Terre, anges, démons, créatures voire mêmes humains... Je me demandais si cet ange n'était pas totalement fou en fin de compte. Un peu par pure vengeance, je fis en sortes que mon aura lui montre bien à quel point il m'exaspérait quand je le voyais comme ça avec les clients, avant de me rendre compte que je me comportais comme un véritable gamin. Bah... j'avais pas tellement eu d'enfance, alors j'en profite un peu maintenant, aucun mal à ça...

Néanmoins, je ne pense pas que lui rappeler ce qu'il avait vécu était la meilleure chose à faire, aussi je pensais changer de sujet tout de suite ou carrément faire genre j'allais nettoyer une table, mais lui continua tout de suite la conversation, que j'écoutais attentivement. Ainsi, je comprenais un peu ce qu'il devait ressentir. Pas que ça m'intéresse, hein, loin de là ! Je ne me soucie pas d'un ange ! Enfin... juste un peu... Breeef. Mais sa phrase me fit réfléchir...

« Avancer, hein ?... J'ai l'impression que dans ma vie, je n'ai fait que reculer... »

Après tout, c'était vrai. Je restais dans mon monde. Dès qu'on le chamboulait, je tuais le responsable et je reprenais ma vie tranquille. Je n'avais pas tourné la page sur l'épisode qui remonte à douze ans de cela. Ce n'était pas ce que j'appelle avancer.

« J'estime que ma vie n'a pas trop d'importance face à celle d'un "soldat de Dieu", tu vois. Donc je ne pense pas que ça soit utile que je te raconte la mienne. »

Malgré la pointe d'ironie sur les mots "soldat de Dieu", je pensais vraiment ce que je disais. Ce n'était pas que j'avais tendance à me sous-estimé, c'est juste que j'étais réaliste. Ma vie n'avait aucune importance. Sur ces mots, je sortis un calepin de ma poche et partis prendre la commande de clients qui venaient d'arriver, sûrement les derniers ou presque de la soirée. J'avais conscience d'avoir laissé l'ange seul sans lui avoir répondu, mais je ne savais pas si j'étais prêt à raconter ça. L'avoir raconté à une seule personne dans ma vie, c'était déjà beaucoup trop pour moi, alors je n'en savais rien. Je me chargeai d'un autre client qui venait d'arriver tandis que mon "collègue" faisait de même, avant de partir débarrasser une autre table et passer rapidement un chiffon dessus pour la nettoyer. J'empilai verres et assiettes dans mes mains et partis les déposer dans les cuisines. Alors que j'avais encore les mains pleines, je sentis une présence légèrement familière derrière moi. Je me retournais et eus juste le temps de voir Chul Hei avant de sentir ses bras autour de moi. Sur le coup, j'étais tellement déstabilisé que je manquais de lâcher tout ce que j'avais dans les mains. Je déposais lentement ledit contenu de mes mains, hésitant sur ce que je devais faire. Puis, sur le coup d'une impulsion, je serrais mes bras le plus fortement possible autour de l'ange en déposant mon front sur son épaule. Câlin de détresse ? Le concept est un peu étrange, j'ai envie de vous dire. Je poussai un soupir et relâchai Chul Hei, m'éclipsant rapidement des cuisines.

Une fois en dehors, je m'adossai encore une fois au mur, comme il y avait quelques minutes de cela, pensif. Je sentis alors Chul Hei me rejoindre, même si je le sentais un peu hésitant. Je pensais bien qu'il avait du ressentir tout ce que moi je ressentais avec notre étreinte, ce dont j'avais un peu honte.

« J'me vengerais un jour... »

Référence au câlin. Alors qu'il avait sûrement compris que je ne l'avais pas repoussé et que justement, j'en avais vraiment besoin et que je ne le refusais pas. Surtout quand annonçant cette vengeance en question, je ne devais pas trop avoir l'air convainquant. Sous une autre impulsion, je vis toutes les images de mon enfance et adolescence devant mes yeux. Et je parlais.

« Je... je n'ai jamais connu mon père. Je crois qu'il est mort tué par ma mère avant que je sois né, une démone... Et elle ne m'a jamais aimé. Elle m'a battu tout petit, mes bras et mon dos en témoignent. Et un jour, je n'ai pas pu retenir mes pouvoirs, et je l'ai tuée. J'ai cru que mon monde s'effondrait. Je l'avoue, c'était malsain comme relation. Beaucoup trop. C'était mon bourreau et ma mère, elle a failli me tuer des dizaines de fois, mais c'est la seule personne que j'ai autant aimé. Après, j'ai été traîné dans des dizaines de familles d'accueil et d'orphelinat, tous sont morts, tués par des anges ou des démons à chaque fois que je me défendais. Puis après je suis venu au Japon... et j'ai vécu dans les rues pendant plusieurs années avant de devenir ce que je suis maintenant Mais tu sais, ça ne change rien. Je suis et serai toujours une abomination, tu vois. »

Je me tus. C'était un peu trop pour moi, je dois dire. Néanmoins, j'avais envie de... de remercier Chul Hei ? De quoi ? D'avoir voulu m'aider, de m'avoir écouté ? Aucune idée. D'autant plus que je n'étais pas du genre à remercier quelqu'un. Je jetais un coup d'oeil dehors, voyant une pluie battante tombant sur la capitale nippone.

« Je finis mon service dans quelques minutes... tu veux venir chez moi ? Enfin, ne crois pas que je te fais confiance... une idée comme ça... c'est comme tu veux. »

J’avais comme l’impression que ma bonne humeur l’agaçait, mais comme je le lui avais dit, rien de ce qu’il dira ou fera n’y changera rien ! Et plus j’étais avec lui, plus j’en apprenais, plus je pouvais apaiser mon esprit de pouvoir aider une nouvelle personne qui plus est puissante et presque inaccessible. Je ne recherchais jamais quelqu’un à aider, non, généralement je tombais sur ces personnes par pour hasard et je n’étais jamais déçu car chaque nouveau défi pour moi est une aubaine ! Une sorte de rachat, une sorte de satisfaction de soi, d’avoir aidé quelqu’un d’autre que soi, d’avoir aidé des êtres qui le mérite ! Qui sont seuls, qui sont mal aimé et je ne sais que trop bien quel genre de problèmes la solitude et le manque d’affection entraine, je pouvais d’ailleurs le constater sur Ji Hoon ! Il avait en quelque sorte répondu à ma bonne humeur par un jeu enfantin pour moi, celui de la force… ce qu’il voulait me faire passer comme message, c’était « ne m’énerve pas »

Je lui avais souris tout simplement puis… nous avions abordé un sujet assez sensible chez moi, si bien que je m’étais demandé s’il ne s’était pas vengé, mais à en voir sa gêne, je compris que non. J’avais tout de même pris l’initiative de lui répondre puisqu’il m’avait demandé et même si je ne suis pas le plus à plaindre, chaque douleur était grande suivant ce qui touche le plus la personne. Les gouts, les couleurs sont propres à chacun et Ji Hoon pouvait ne pas être sensible aux enfants comme moi je l’étais en raison de mon passé. La petite leçon que avec laquelle j’avais conclue le tira surement de sa réflexion puisqu’il y répondit d’une façon pessimiste, comme je m’y étais attendu et lorsque je lui avais demandé son histoire, je frissonnais à ses appellations et la façon dont il se considérait. J’aurais voulu frapper dans quelque chose, mais ce n’était pas mon genre et je préférais réprimer mes instincts violents pour ne pas qu’il tire des conclusions hatives.

« J’étais un soldat de Dieu, pas très fidèle je l’avoue, tu en as la preuve… et pour moi, ange… démon, humain, ne sont pas bien différent alors le fruit d’une relation entre deux de ces races n’est en rien une abomination à mes yeux. »

Je lui avais répondu sur le chemin, en l’ayant presque doublé pour aller accueillir les clients, les mots avaient été prononcé assez bas pour que seul lui puisse entendre et j’en étais plutôt content, car, toujours souriant il savait maintenant pour quelles raisons j’étais sur terre, pour quelles raisons je trahissais en quelque sorte mes « frères » et j’espérais qu’il comprenait bien que pour moi, aucune créature de ce monde n’était une abomination. J’avais vraiment de la peine que l’aïon considère son existence de la sorte et je ne pouvais m’empêcher de penser à Andreas, lui qui avait tant souffert de l’absence de son père ! Et surtout de n’avoir aucun espoir de le voir. Encore lui, il avait de la chance, on ne le poursuivait pas trop. Mais cette instabilité fortement présente chez tous les aions ou presque était le réel problème. Que serait-il arrivé si ange et démon avaient laissé une structure aux « croisés » ? Ils seraient sans doute moins dangereux.

C’est en craignant de me faire broyer les os que j’avais décidé lâchement d’enlacer mon nouvel ami pour calmer mes pensées et également apaiser les doutes qu’il devait avoir sur son existence et sur ce que je pensais de lui. Pas spécialement moi, non, je savais que Ji Hoon avait en horreur ange comme démon et ce n’était pas difficile à comprendre, mais… de la à vraiment comprendre qu’un ange ne le craigne pas, ne le repousse pas, ça devait lui paraître improbable et quoi de mieux qu’un câlin pour lui faire une démo de mes paroles ? Seulement, avant que je parte, il avait posé les assiettes et je n’osais bouger de peur de le froisser. Je fus surpris lorsque son front se posa sur mon épaule et que ses bras m’entourèrent, si surpris que… mes yeux s’écarquillèrent. Heureusement qu’il ne pouvait pas voir, je crois qu’il aurait eu peur que je sois choqué ou que sais-je ! Et encore plus content, évidemment, je me mordis la lèvre, lui frictionnant doucement le dos avant de me délier de lui et d’attendre sa réaction. Enfin… non, je ne l’attendis pas, préférant de loin fuir le temps qu’il se calme, dans le doute, et j’avais eu raison. En revenant, il m’avait dit qu’il se vengerait mais sans grande conviction ! Mes excuses l’avaient peut-être freiné ?

« ah… tu peux, je sais que je t’ai surpris, mais… je suis content que tu ais accepté cette étreinte ! »

Lui faisant un clin d’œil, je regardais la pile de vaisselle qui me narguait légèrement. Moi qui suit un peu maniaque sur les bords, je m’y mis instinctivement, comme s de rien était tout en l’écoutant. Son récit me tordait le cœur dans tous les sens… si bien que je ne pouvais retenir une larme, essuyant rapidement cette dernière du revers de ma manche en arrêtant l’eau. Je comprenais maintenant pourquoi il croyait être une abomination…

« Ton histoire est bien plus terrible que la mienne… je ne te prends pas en pitié… j’aimerais d’ailleurs dire que je comprends… que malgré le mal fait par ta mère, tu puisses l’aimer. « Omma » est un mot que tout le monde connait et peut importe ce qu’il se passe on ne peut que chérir cet être. »

Je marquais une pause, troublé par son récit, encore sonné par le mal qu’il avait enduré par la faute de mes « frères », devais-je les considérer comme tel ? Je savais qu’avant lui, il y en avait eu des milliers, et que sais-je encore, mais ressentir la souffrance d’un aion est encore pire que d’écouter ce qui se raconte aux cieux.

« Ta mère ne t’as pas tué… c’est qu’elle tenait à toi tout de même… et pour ce qui est de tes pouvoirs et ce qui s’est passé, c’était un accident. »

Reniflant malgré moi, je clignais des yeux, peut-être un peu trop sensible par l’eau qui avait légèrement envahie mes globes, je lui souris faiblement, posant très lentement ma main sur son épaule.

« Tu es si jeune… et tu as tellement vécu… ne dis jamais que tu vaux moins, tu as beaucoup plus de mérite d’avoir supporté tout ça… cette volonté qu’on certain de vouloir te détruire me détruit toujours un peu plus… car je suis partagé entre être un ange… et être… être… je ne sais quoi… juste… quelqu’un. J’aurais voulu être la pour toi quand tu en as eu le plus besoin… et à défaut de ne pouvoir remonter le temps, je ferais tout mon possible pour être à tes côtés maintenant »

Un discours de plus, de moins, mais que je tenais toujours à Andreas car je m’inquiétais constamment pour lui et aujourd’hui je le tenais aussi à Ji Hoon, tous les deux se ressemblaient sans être pareil et je souris légèrement en enlevant ma main sagement, le regardant sans planter mes yeux dans les siens pour ne pas l’embarrasser. Le silence s’était fait pesant et… le seul bruit qui attira notre attention à tous les deux fut la pluie. Nous étions tous comme la pluie, éphémères.

Il ouvrit la bouche et me demanda si je voulais bien venir chez lui, affirmant que ce n’était pas un signe de confiance et j’acquiesçais doucement en reprenant mon sourire pour qu’il ne s’énerve pas. Je savais que la pitié n’était pas son truc et même si ça n’en était pas, il pouvait le prendre de cette façon.

« Et… tu ne recules pas je trouve… tu avances… en tous les cas, tu as montré que tu en étais capable Ji Hoon… alors, continue de te battre ! … Non… enfin tu m’as compris ! »

Je me mordis la lèvre et répondit alors clairement à la question qu’il m’avait posé pour qu’il ne croit pas que je l’avais ignoré.

« Je veux bien, à la condition que ça ne te dérange pas trop ! »

Finissant de débarrasser, je fis la dernière vaisselle, giclant un peu d’eau sur le tablier de mon ami pour essayer de le stimuler un peu plutôt que de nous endormir à broyer du noir ! Puisque nous devions aller de l’avant, autant commencer tout de suite !

To be continued

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